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Photo : Josée Novicz

Ceci n’est pas une exposition, plutôt la mise en valeur d’un département souvent négligé dans ce monstre qu’est le Louvre. La raison ? La restauration (en cours) des 150 œuvres de ce genre, datées des dix-septième et dix-huitième siècles et conservées sous la Pyramide. Précisons l’évidence : ce n’est pas grâce à l’institution que la millionnaire aux lunettes rondes tente de dissoudre au nom de la bancocratie des ordures en marche, que le musée peut attirer l’attention sur un ensemble de portraits techniquement spectaculaires. Pourtant, la restauration a permis de remplir plusieurs missions, parmi lesquelles on peut citer, au gré de la conférence de présentation utilement mise en ligne :

  • le dépoussiérage,
  • la restauration des parties abîmées ou cachées par tel recadrage,
  • la vérification des attributions aux artistes,
  • la correction de titres erronés (les noms des modèles présentés paraissant parfois suspects aux conservateurs), et
  • l’inspection des parties cachées (donc la découverte d’académies ou d’esquisses).

Aussi la re-présentation de cette collection s’adresse-t-elle à ceux qui n’ont pas encore sondé l’intégralité des ressources locales (à tous, donc) ; on ne peut que se réjouir du souci de pousser en avant ce qui, d’ordinaire, peut tendre à se fondre dans la masse de chefs-d’œuvre blottie sous la mini-tour Eiffel asiatique qui souille la place du musée. C’est surtout l’occasion, en dépit d’un éclairage souvent insatisfaisant tant les lumières tendent à taper sur les verres protecteurs, d’apprécier l’art du pastel dans ses plus fines expressions, telles que :

  • le rapport entre ombres et lumières ;
  • la richesse des nuances ;
  • la précision des contours ;
  • le sens des postures ;
  • la variété des expressions ;
  • la capacité à défier des formats variés, même quand l’imprimerie ne suivait pas ;
  • l’originalité de certaines compositions repoussant le portraituré au second plan ;
  • le goût sporadique pour le détail (les fameuses « cerises » de John Russell ou les encyclopédies de la Pompadour par le grand Maurice dont certaines traces révèlent les différentes versions du pastel…),
  • le mélange de techniques (la peinture s’associant parfois au pastel), sans oublier
  • la splendeur des encadrements (pardon, des bordures).

De même, la finalité variée des œuvres nourrit l’imaginaire du visiteur. Il peut s’agir, par exemple,

  • d’œuvres de commande visant à fixer les traits d’une personne importante, c’est-à-dire riche ;
  • d’images de pub pour promettre à son éventuel futur mec que Marie-Antoinette n’était pas un laideron ;
  • de fixations de moments familiaux voire spéculaires (autoportraits de Jean Baptiste Siméon Chardin) traduisant la virtuosité du pastelliste ; et
  • de projets plus tournés vers l’expressivité artistique, qu’elle s’appuie sur des prétextes classiques (nymphe de la suite d’Apollon par Rosalba Carriera), des visages anonymes (la « dame âgée » croquée par Joseph Ducreux), des paysages pas si fréquents au pastel (étendues montagnardes de Jean Pillement) ou des sentiments (l’effroi par Jean-Baptiste Greuze, l’innocence – ce prétexte érotique – qui émoustille Pierre-Paul Prud’hon).

Pour autant, force est de reconnaître que, en dépit de la relative petite taille de l’événement, le non-expert peut se sentir un peu perdu devant la similarité des réalisations – quasi exclusivement des portraits –, ainsi que par la spécialisation poussée des questions liées à l’attribution (l’exemple donné par Xavier Salmon sur la touche de blanc dans un œil justifiant la signature de Quentin de La Tour laissera probablement sceptiques les ignorants) ou à la recherche des modèles (le non-historien se sentira vite exclu d’un débat proche des polémiques autour du médaillon d’Isis Novnak). Ce nonobstant, une telle hypothèse témoigne, à l’évidence,

  • de l’ignorance du présent visiteur,
  • de l’utilité que peut avoir un guide de talent (une seule visite proposée, le samedi à 11 h 30 : quel dommage !), et
  • de la difficulté étrange que nous éprouvons parfois à nous laisser, simplement, séduire par une perfection artistique apparemment redondante – mais apparemment seulement.

En conclusion, ce coup de Stabylo sur des pièces remarquables et revivifiées – rappelons-le : pas grâce à l’État français, plus soucieux de payer une piscine à cette cochonnerie de Pharaon Ier de la Pensée Complexe – ne décevra sans doute que le visiteur lui-même décevant. L’on peut donc s’y rendre d’autant plus joyeusement que, outre la curiosité légitime que doit susciter l’événement, le coûteux billet d’entrée permet ensuite de folâtrer partout dans les expositions permanentes. Ne pas ressortir ébloui de telles baguenauderies, même lorsque l’on a oublié son appareil photographique – d’où les clichés médiocres qui accompagnent cette notule –, mériterait alors la décollation avec un minimum de courtoisie, soit, mais sans délai.

Photo : Josée Novicz

Jusqu’au 10 septembre. 15 à 17 €, ce qui est quand même super cher vu qu’un contribuable parisien paye déjà pas mal de fois pour ce musée, mârde. Rens. ici.