Blogadmin

Irakly Avaliani joue Frédéric Chopin – 4/6

Première du disque. Visuel : Masha S.

 

Au rayon musique, les sachants sachant s’adresser au grand public considèrent parfois Frédéric Chopin comme un gâteau multigoût, dont ils présentent les parts comme un camelot vanterait tour à tour

  • son presse-agrumes miracle,
  • son couteau incurvé idéal pour impressionner vos invités en découpant à la perfection vos melons – et je ne parle pas de ce que je vois devant moi, chère madame, hahaha, ou
  • son ramasse-miettes à piles faisant aussi ventilateur (penser toutefois à vider le réservoir avant d’inverser les fonctions, évidemment).

Appliquée au compositeur, cette partition, et hop, distingue par exemple

  • les valses comme une musique de salon,
  • les nocturnes comme une musique de l’instant en forme de journal intime,
  • les polonaises comme une musique de l’identité,
  • les mazurkas comme une musique de la nostalgie, etc.

Va, donc, après

pour trois danses nostalgiques, même si Irakly Avaliani fait l’effort de glisser une œuvre en majeur – donc censément souriante – au milieu des deux mazurkas en mineur – donc a priori pas super, super gaies.

 

 

La mazurka op. 30 n°4, en ut dièse mineur, s’ouvre sur un prélude claudiquant dont l’interprète traduit l’hésitation qui n’est pas que tonale car elle s’appuie itou sur

  • des rythmes pointés de vitesse variable,
  • des contretemps tonifiants et
  • des appuis contre-intuitifs pour un non-Polonais-natif.

Aux larges arpèges de la main gauche répond une main droite partagée entre mélodie et broderies

  • (mordants,
  • triolets de doubles croches,
  • appogiatures).

Le pianiste s’amuse à envelopper le texte de mystère en accentuant la tension entre

  • danse chaloupée où le temps fort est sur le temps faible
    • (régularité du dessin rythmique,
    • clarté du lead,
    • fonctionnalité de l’accompagnement) et
  • musique savante réinvestissant les contraintes folkloriques (jeu notamment sur
    • la suspension par exemple des points d’orgue,
    • l’irrégularité des grupetti et
    • le prolongement de la croche par les choix de pédalisation).

La science de la respiration, qui n’est en l’espèce rien d’autre que l’art de répartir les notes dans l’espace temporel, invite l’imagination à la grâce chorégraphique, entre

  • figures imposées,
  • liberté du mouvement et
  • attention à une musique prévisible seulement en partie.

On goûte donc

  • le swing des accents,
  • la jubilation des trilles,
  • la souplesse de l’agogique finement dosée,
  • la légèreté tranquille des basses bondissantes,
  • l’irisation des nuances et
  • la maîtrise d’un tempo polymorphe, associant
    • allant,
    • emballement et
    • suspension, et même
  • le plaisir malicieux de la descente chromatique finale jusqu’à un dernier accord comme prêt à repartir sur la danse suivante, faute d’une conclusion pleinement satisfaisante.

 

 

La mazurka op. 67 n°3, en Ut, est assurément choisie pour contraster avec la précédente. Outre le mode plus solaire,

  • la légèreté du lead,
  • la dynamique du tempo et
  • la clarté du discours

proposent une facette différente du même groove. Ici, sous les doigts d’Irakly Avaliani,

  • nuances,
  • accents et
  • contrastes

sont plus vivement caractérisés. L’effet joyeux est garanti, d’autant que cela n’exclut pas des effets d’une belle efficience musicale

  • (complémentarité des trois voix principales dans la micropartie centrale,
  • ritendo qui, en effet, est plus retenu que ralenti, et
  • fermeté des doigts reprenant presque avec bonhommie la fredonnerie initiale),

qui nous incitent à redemander un peu de champagne pour les oreilles !

 

 

La mazurka op. 17 n°4, en la mineur, est la plus développée du trio sélectionné par le pianiste. C’est aussi la plus célèbre et peut-être la plus riche tant elle

  • associe,
  • fait contraster et
  • parvient presque à mélanger

les deux caractères possibles de la mazurka entre jubilation et mélancolie – Jean-Marc Luisada l’explique bien aux pianistes amateurs dans cette vidéo. L’auditeur attentif y retrouve des caractéristiques ouïes dans la première mazurka du programme :

  • le mode mineur, bien sûr,
  • le prélude mystérieux et, bientôt,
  • la coda suspendue.

Irakly Avaliani y excelle grâce à

  • son toucher à la fois aérien dans la lumière triste de la dextre et profond dans la dense pénombre (et hop, un chiasme !) de la senestre,
  • sa manière de poser des notes
    • (a tempo,
    • dans la fluidité ou
    • en les laissant attendre) et
  • sa capacité à dompter le clavier plus en peintre ayant autorité sur sa palette qu’en musicien armé d’une impressionnante rangée de marteaux.

De même que le couscous est peu sapide sans la harissa (je sais pas, la comparaison m’est venue ainsi, alors bon, je tente), la mazurka n’est pas authentique si l’on en escamote l’étrangeté épicée. Sans en lisser les contours par des phrasés mous occultant le rôle du troisième temps, l’artiste semble dissoudre dans un flux plus libre que chaotique la complexité rythmique de l’œuvre exprimée notamment par la répartition et l’articulation

  • des accents,
  • des notes dans les grupetti,
  • des pulsations ternaires,
  • des rythmes pointés,
  • des appogiatures et
  • des indications “tenuto”.

La partie majeure semble chercher à s’envoler vers la lumière ; mais

  • les trébuchements (triolets),
  • la pesanteur de la main gauche et
  • l’absence de développement

annihilent toute espérance dans un long fa aigu. Dès lors, plus de doute ! Il est vain d’escompter renouer avec

  • le kif,
  • l’insouciance et
  • la très soutenable légèreté de l’existence.

La partie A de la mazurka revient, toutes

  • mélancolie,
  • nostalgie et
  • acceptation fataliste

dehors. La coda entérine cet adieu à la joie

  • de ce qui fut,
  • de ce qui eût pu être, et
  • de ce qui se perdit sans avoir seulement failli paraître.

L’interprétation sensible et grave qu’Irakly Avaliani propose de cette mazurka clôt ainsi un best of bref mais puissant émotionnellement, que devrait bousculer l’objet d’une prochaine chronique : un florilège de trois valses…

 

À suivre…


Pour écouter l’intégralité du disque, c’est par exemple ici.

 

Éloge du bureau insaisissable

Au théâtre du Gouvernail (Paris 19), le 26 juin 2024. Photo : Rozenn Douerin.

 

Travailler, c’est pas beau, mais voler, c’est trop dur ; et comme d’mander la charité, c’est que’qu’ chose qu’j’peux pô faire, je me renseigne beaucoup sur le travail. Voici donc le deuxième mouvement du retour d’expérience sur le sujet que je proposai tantôt au théâtre du Gouvernail (Paris 19).

 

 

Théo Boulakia et Nicolas Mariot, “L’Attestation”, Anamosa – 2/2

Détail de la première de couverture

 

Impressionnant ouvrage sur l’attestation inventée lors du premier confinement, le livre de Théo Boulakia et Nicolas Mariot

  • captive,
  • secoue,
  • interroge.

Après un premier épisode disponible ici, here comes la fin de notre compte-rendu sur ce travail

  • solide,
  • tonique et
  • sans fard.

 

3.
Contrôler le confinement français

 

Voilà en quoi le confinement est une expérience policière de contrôle de masse inédite en France : grâce à lui, “les possibilités offertes à la surveillance ont été brusquement et considérablement élargies” (124).

  • D’un point de vue technique, la liste des infractions s’est élargie ;
  • d’un point de vue légal, les pouvoirs de contrôle des forces de l’ordre vont dorénavant jusqu’à “vérifier l’identité d’un individu au seul motif qu’il est dehors” ;
  • d’un point de vue ontologique, l’individu qui sort dans l’espace public est automatiquement frappé d’un soupçon d’infraction.

Cartes à l’appui, les auteurs montrent que, là encore, cette dynamique du contrôle ne jaillit pas ex nihilo. Elle touche certes à présent, dans une petite mesure, des individus propres sur eux qui n’avaient jamais été contrôlés auparavant (précisément parce qu’un contrôle sans motif était interdit) ; mais elle frappe encore davantage ceux que la stigmatisation sociale ou raciale transformait en cibles prioritaires. Doit-on s’étonner si

  • “les trois territoires les plus pauvres de France figurent dans le Top 5 des départements les plus verbalisés” ?
  • “la minuscule enclave moins verbalisée en Île-de-France” est les Hauts-de-Seine – on peut néanmoins, ici, se demander si les auteurs ont bien conscience de l’évolution sociologique d’un 92 peu réductible à Auteuil-Neuilly-Passy, version les Inconnus (149) ? et si
  • “les amendes Covid-19 constituaient une nouvelle arme – redoutable – pour chasser les jeunes hommes noirs et maghrébins des espaces publics” (182) ?

Le prétexte du coronavirus permet au pouvoir de davantage contrôler la population, à la fois physiquement et psychologiquement – ainsi quand l’autorité joue avec la présence visible et soupçonneuse des uniformes en affichant le nombre de contrôles et de verbalisations, ou en le masquant de peur de susciter non plus la crainte mais la lassitude sinon la colère. Avec obstination, le livre

  • compile,
  • évalue autant que possible et
  • analyse

la diversité des contrôles, parfois renforcée par l’absence de vidéosurveillance – c’est le cas à Brest, objet d’un rare jeu de mots au mitan de la p. 160. Il ne nous est

  • rien caché de la complexité consubstantielle à la construction de méthodologies comparées ;
  • rien masqué des limites d’une telle stratégie – que ce soit parce que l’analyse est biaisée de facto ou parce que certaines informations, en dépit de relances personnelles et collectives auprès des institutions, restent inaccessibles ;
  • rien celé de la difficile donc palpitante association entre vue surplombante et anecdotes a priori significatives mais objectivement très partielles.

De même, les auteurs proposent des analyses terminologiques qui se révèlent aussi pointilleuses qu’éclairantes, que ce soit en compagnie de Vincent Descombes ou de Pierre Thévenin pour la question de la liberté d’appréciation des agents sur le terrain, entre arbitraire et discrétion administrative influencée par des “autorités de tutelle” cherchant à orienter “l’appréciation vers la répression”. L’affaire est souvent complexe, mais elle est largement explicitée par des bilans confirmant ce que, parfois, l’on a davantage cru comprendre que parfaitement saisi. De la sorte avance-t-on, loin

  • des rumeurs,
  • des intuitions,
  • des convictions à l’emporte-pièce et
  • des positions de principe,

vers une meilleure compréhension de la déflagration politique qu’ont été le confinement et son couronnement, l’attestation, dont Théo Boulakia et Nicolas Mariot montrent comment ils actualisent un sous-jacent qu’ils appellent l’inquiètement (185).

 

4.
Verbaliser le confinement français

 

L’inquiètement désigne la capacité à rendre inquiétant un objet, une catégorie de personnes ou un espace. Avec le confinement qui consistait à inquiéter les Français

  • (danger du virus tueur,
  • danger de l’acte mauvais consistant à répandre le virus,
  • danger d’être contrôlé et châtié),

l’État s’est clairement débarrassé de ses citoyens

  • en vidant l’espace public,
  • en le surveillant avec des moyens jadis illégaux,
  • en rendant complice le citoyen de cette surveillance augmentée via l’attestation, et
  • en réussissant à “pénibiliser les sorties en [rendant] inquiétant le dehors”.

Un ensemble de stratégies sont évoquées, parmi lesquelles

  • menaces exotiques sur le danger de sortir de chez soi,
  • multiplication grotesque des interdictions d’espaces ou d’activités,
  • diffusion scandaleuse de vidéos menaçantes réalisées par des agents de l’ordre ou d’annonces “façon cirque itinérant” depuis les hélicoptères ou les voitures de police,
  • contrôles spécieux aboutissant à des décisions punitives infondées en droit (220),
  • habilitation fallacieuse d’auxiliaires non habilités (notamment ces nuisibles qu’on appelle les chasseurs) à sanctionner ou faire pression sur d’autres citoyens (201),

le tout ne rechignant pas

  • aux redondances,
  • aux incohérences et
  • aux abus interprétatifs de textes peu clairs, par malice ou incompétence,

tant il est vrai que ce que l’on ne comprend pas inquiète encore plus. Les auteurs soulignent que ces stratégies, mal coordonnées et pourtant cohérentes, ont pu susciter différentes réactions. S’il semble que la soumission benoîte voire ressortissant de la surenchère l’ait emportée, des sursauts ont aussi existé. Une enquête co-pilotée par Nicolas Mariot brosse (ha, ha, au moins) six portraits de confinés selon leur “ligne de conduite” :

  • les légalistes et les exemplaires,
  • les insouciants,
  • les réfractaires et les protestataires, et, catégorie spéciale
  • les claustrés.

La question liminaire est toujours en jeu : pourquoi obéit-on ? Mais elle s’associe à d’autres, comme :

  • pourquoi,
  • quand,
  • comment

désobéit-on ?

 

5.
Vivre le confinement français

 

Toujours soucieux de profondeur comparatiste, les auteurs s’appuient sur l’exemple historique de la paysannerie ainsi que sur l’intéressante distinction numérique et ontologique entre mutins et déserteurs. À ces aunes, les auteurs rappellent que les petites gens que nous sommes ont souvent “une infinité de tactiques furtives visant à préserver et étendre leurs droits”, c’est-à-dire à

  • franchir la ligne blanche pour
  • mordre la ligne jaune sans
  • outrepasser la ligne rouge (pas les moyens, qu’ils soient
    • intellectuels,
    • politiques ou
    • financiers).

Marginales ou radicales, ces pratiques ne masquent pas la soumission collective que, fût-ce avec réticence, prudence et circonvolutions, l’étude estime, graphes à l’appui, avoir “davantage à voir avec le rapport à l’État que la peur du virus”. Pour preuve ou presque, selon leurs données, ce sont “les personnes les moins menacées par le virus et confinées dans les conditions les plus inconfortables qui se sont enfermées [le plus strictement] lors du confinement du printemps 2020”, peut-être par une “résignation ordinaire à l’ordre social” faute, peut-être,

  • d’un bagage éducatif ou culturel conséquent,
  • d’un statut socioprofessionnel déjà affirmé voire
  • d’un engagement politique ou syndical fort (289).

Pour autant, ne peut être passé sous silence l’existence d’une catégorie de citoyens qui ont pris plaisir à l’enfermement par

  • “domestication des règles” participant de la “pratique du consentement”,
  • adoption de la rhétorique “du ralentir et du profiter”, et
  • “comparaison entre sa propre situation et celle, réelle ou fantasmée, des autres” (290).

D’autres ont aussi pris plaisir à enfermer les autres par le recours zélé à la délation motivée par

  • la vengeance vicinale,
  • la jalousie dévorante,
  • l’inclination à la soumission,
  • le respect béat de la parole des chefs et des blouses blanches à la botte du gouvernement donc enivrées par leur gloire soudaine,
  • la peur instillée par les médias d’État ou par les médias que l’État subventionne richement, ou par
  • l’ennui à tuer (l’ensemble étant potentiellement cumulatif).

Le cas des femmes gêne aux entournures les auteurs – qui ont l’intelligence de nous faire partager leur malaise – car, parmi les “dizaines de millions de personnes surveillées par quelque 160 000 policiers et gendarmes”, elles semblent être plus que les hommes restées “enfermées chez elles”, peut-être par une “obéissance plus grande” aux lois (sous-entendu : étatiques et domestiques), ce qui “apporte de l’eau au moulin d’un stéréotype” mais peut aussi éclairer une situation genrée que les féministes de tout sexe appellent à faire évoluer au plus vite. Une fois encore,

  • le confinement,
  • l’usage de l’attestation et
  • le respect plus ou moins grand des ordres et conseils dispensés par les gouvernants avec costume ou blouse blanche, à supposer que la distinction ait, en la circonstance, un sens,

fonctionnent comme un phare dont le faisceau, décrypté avec sapience par Théo Boulakia et Nicolas Marlot, nous parle d’une situation qui dépasse le printemps 2020.

 

Conclusion

 

Après ce balayage rapide et partiel d’un ouvrage passionnant, force est de saluer ce travail qui montre

  • combien la démocratie dont nous sommes si bêtement fiers et sûrs est fragile alors que, depuis notre fierté et notre sûreté, nous jugeons les autres régimes avec une prétention impatientante, consternante et grotesque,
  • combien l’exigence de liberté pour laquelle nous croyons vibrer est relative, et
  • combien est inquiétante (ou devrait être inquiétante) la capacité de l’État à
    • contrôler les individus avec leur consentement,
    • dresser les citoyens les uns contre les autres et
    • manipuler l’opinion pour arriver à ses fins moins institutionnelles que très humaines : le maintien au pouvoir.

Alors, certes, l’on peut

  • pointer quelques éléments méritant d’être discutés (le “tapage” pour les soignants n’était-il pas plutôt un signe de soumission qu’une révolte ? a-t-on vu, après le confinement, les citoyens se révolter pour que cesse la destruction par putréfaction ou dynamitage de la santé publique ? etc.), c’est bon signe – l’unanimité est ennuyeuse et, utilisons le terme technique, flippante ;
  • regretter une éditorialisation orthotypo peu poussée (majuscules et place du point dans les citations, absence de suppression du foliotage en fin de chapitre, etc.) ;
  • déchirer ses vêtements devant de maladroits cahots de formulation (récurrents “d’ailleurs” ou “par ailleurs” trahissant une construction qui aurait parfois pu être plus rigoureuse, “d’autre part” souvent orphelin de son “d’une part”, etc.) ;
  • s’étonner que ces tics se retrouvent aussi dans certains témoignages officiellement non écrits par les auteurs ;
  • admettre que certains passages algorithmico-graphico-analytiques ont dépassé notre capacité intellectuelle (par chance, les auteurs avaient prévu le coup en explicitant plus loin) ;
  • se dire que, peut-être, les conséquences psycho-politiques du confinement auraient pu être davantage évoquées dans la conclusion ;

reste un livre

  • qui séduit parce qu’il inclut le making of son raisonnement, n’imposant
    • ni un biais unique,
    • ni une analyse magistralo-intouchable,
    • ni une exégèse visant à coller avec telle école de pensée, tel courant, telle conviction ;
  • qui tient brillamment le pari d’un étonnement (comment ça a pu marcher ? qu’est-ce que ce succès consternant dit des Français et de la France ?) devenu réflexion ;
  • qui s’enrichit d’une ouverture comparatiste
    • jamais show-off,
    • parfois inattendue,
    • souvent éclairante,
    • toujours exploitée avec savoir-faire ; et
  • qui fait écho à des interrogations profondes que le grand public ne pouvait pas penser clairement avant une telle publication.

En somme, L’Attestation est un livre (si) que, si ce n’est déjà fait, vous pourrez lire avec grand intérêt sur votre lieu de villégiature ou en restant chez vous

  • faute de pouvoir baguenauder en vacances,
  • par choix ou, le traumatisme persiste à en croire le nombre de zozos que l’on croise avec un masque,
  • pour sauver des vies.

Et pourquoi pas ? Il y a pire projet que sauver des vies, non ?

 

Carlos Zaragoza et Kishin Nagai, “Five verses” (IBS) – 3/5

Première du disque

 

Voilà ! Avec Five verses d’Orlando Bass (œuvre audible en concert ce 16 juillet à la Chapelle des pénitents de Gap par Joonatan Rautiola au sax et Cyrille Lehn au piano), nous entrons dans

  • le cœur battant,
  • le money time et
  • le momentum

du disque élaboré par Carlos Zaragoza en compagnie de Kishin Nagai qui aspire à associer – clairement donc mystérieusement – poésie et musique à travers des créations. Après

le morceau à cinq faces qui donne son titre à l’album s’emberlificote autour d’extraits de sonnets shakespeariens ayant inspiré cinq miniatures au compositeur.

 

 

Plus de quatre siècles après leur première publication, l’ensemble matriciel est toujours auréolé d’un triple parfum de scandale :

  • d’abord, l’ouvrage, rassemblant des poèmes intimes, a été officiellement publié sans l’accord de l’auteur ;
  • ensuite, la version princeps est dédiée à un “grand seigneur”, selon Pierre Jean Jouve, qui aurait donc été l’amant secret de William ;
  • enfin, les 144 poèmes expriment des transports érotiques tant à l’endroit d’un homme (pour l’essentiel) que d’une femme, bigre !

Pour travailler cette matière de manière signifiante, il faut du toupet et une culture bien spécifique. Or, quoique Français (nul ne peut avoir que des qualités), Orlando Bass est aussi Britannique et, par le prénom, fils shakespearien de Roland des bois dans Comme il vous plaira. Aussi cette masse textuelle qui paraît souvent souvent plutôt hermétique à une intelligence hexagonale moyenne a-t-elle, pour lui, sens et beauté.

 

 

Son choix se porte d’abord sur le sonnet XXXVII, où l’amoureux se lamente de sa vile condition et s’en réjouit car elle lui permet de vivre à travers la valeur et la droiture de son chéri – attention, dans cette notule, ça va résumer sec. Des accords quasi clustériques, et hop, du piano émerge la voix du saxophone. Une interprétation un rien littéralisante, à laquelle invite la référence à un poème en particulier, observerait

  • le poète-piano engoncé dans sa disgrâce,
  • le chéri-saxophone
    • briller en planant au-dessus,
    • élever en attirant le poète-piano vers les aigus et les nuances plus fortes,
    • accepter les différences qui singularisent chacun des amants, puis
  • les deux amants fusionner dans un fade-out où se mêlent résonance et souffle.

 

 

(Certes, d’un point de vue esthétique, dans cette notule, on pourrait se passer d’une vidéo de temps en temps ; mais les audios ne sont pas si simples à dénicher sur YouTube – alors, pour ceux qui n’auraient pas encore acheté le disque, tant pis pour l’esthétique et tant mieux pour la musique et les curieux !)
Le sonnet XXXIII est un poème météorologique. Le narrateur s’y désespère de ces nuages qui cachent le visage aimé (nuages à la fois réels et symbolisés par tout ce qui nous empêche d’être avec nos petits cœurs d’amour), les “soleils du monde” pouvant se ternir quand le “soleil du ciel” lui-même ternit. Cette fois, les petites saucisses de Kishin Nagai courent promptement sur le clavier. En rapprochant texte et musique, on croit entendre

  • le grouillement des nuages-piano d’où émerge puis où se replonge le soleil-saxophone,
  • le jeu de cache-cache rythmique auquel s’adonnent les partenaires-adversaires et
  • la course à l’abîme dans lesquels courent les trois associés
    • (main gauche remontant vers le médium,
    • main droite y descendant,
    • saxophone se laissant aspirer par cette nuée).

 

 

Le sonnet LXVI cherche en l’amour un médicament contre la pulsion de mort. Le poète en a ras la courge des trahisons, des jugements stupides, de la puissance du Mal face au Bien, de sorte qu’il passerait volontiers l’arme à gauche, n’eût été son souci de ne pas laisser seul celui qu’il aime. Un lamento du saxophone s’entrelace avec la reprise du sujet par le piano en duo puis en trio.

  • Dans cette pièce tonale, comme pour acter l’évidence qu’il y a quelque chose de pourri au Royaume des hommes, on entend la communauté de lassitude exprimée par les deux instruments ;
  • dans les effets d’harmonie et d’écho fugato (on sait combien Orlando Bass aime réinvestir l’exercice redoutable de la fugue qu’il connaît si bien), on entend l’art un rien vicieux de l’amour qui nous pousse à continuer malgré cette fffatigue que nourrissent encore et encore les injustices et la bêtise ;
  • dans les mutations de registre, on entend la tension qui nous fait ramper entre les graves qui nous attirent vers nos graves et les aigus qui nous exaltent puisque love music for a while shall all our cares beguile ;
  • dans l’accélération dissonante qui constitue la dernière partie du mouvement, on entend la capacité hypnotisante de cette contradiction entre Eros et Thanatos de nous pousser vers l’avant jusqu’à ce que plus rien.

 

 

Le sonnet XII, que le livret semble avoir brièvement eu l’intention de traduire, fait partie de la première section du recueil où, en gros, William incite son chéri à procréer afin que sa beauté, forcément passagère, perdure sur Terre à travers sa descendance. C’est le propos précis de ce poème où l’auteur contemple

  • le jour devenir nuit,
  • la violette se faner,
  • la barbe blanchir et s’embroussailler,

avant de conclure que seule une saillie peut préserver la beauté de la faux du Temps. Dans ce mouvement en arche, on entend

  • le battement de l’horloge et la puissance destructrice du temps qui s’amplifie à l’instar des intervalles qui s’élargissent ;
  • le souffle presque inaudible de cette évidence qui devient pourtant aussi évident qu’une alarme précédant l’explosion ;
  • l’effacement progressif de la multiphonie jusqu’à la disparition du son ;
  • l’inéluctabilité de la disparition exprimée par la régularité rythmique qui n’est pas seulement celle, concrète, du temps qui passe jusqu’à ce que plus de temps, mais aussi celle, symbolique, de la fatalité qui nous conduit
    • à la décrépitude (si nous en avons le temps),
    • à la déréliction (si ça se passe mal) et
    • à la mort (ici, pas de conditions à remplir).

 

 

Avec le sonnet LXIV, on ne finit point dans la joie et la bonne humeur, ce qui est un signe d’honnêteté : après tout, la mort est rarement source de joie et de bonne humeur, surtout la sienne. Dans ce texte, le poète constate que

  • se ternissent les plus belles richesses,
  • s’ensevelissent les gloires passées,
  • s’écroulent les plus beaux bâtiments,
  • se dérobe ce que l’on croyait acquis ;

aussi n’a-t-il aucun doute : son amour suivra la même voie ; et le voici contraint de pleurer de jouir d’un tel amour car cette possession va consubstantiellement avec la crainte de se le voir enlever. Comme disait Ricet Barrier du glas, “eh ben ouais, c’est vachement pas gai”. (Heureusement qu’il s’agit du dernier sonnet, les résumés commencent à devenir plus longs que le texte original, c’est très inquiétant ou presque.)
Dans ce climax synthétique soulignant que, au-delà du mythe et du soufre de bon aloi, les sonnets de Shakespeare ne sont pas qu’une œuvre érotique mais une méditation plus universelle sur ce que l’amour et le désir révèlent et de notre grandeur quand nous sommes élevés, et de notre finitude quand nous prenons conscience de notre humanité, on entend simultanément

  • l’urgence de vivre et le danger qui approche que suggèrent les notes répétées courant d’un partenaire à l’autre ;
  • l’évidence de l’inéluctabilité du processus et nos risibles tentatives de fuite que suggère l’exploration de différents registres ;
  • l’effet d’entraînement et d’effarement que suggèrent les segments parallèles descendants, comme si chacun essayait de se rattraper à l’autre et ne faisait qu’accélérer la chute de tous ;
  • la pulsion de vie liée à la dynamique et au tempo, et la dégringolade mortelle qu’expriment tant les traits pianistiques que les halètements saxophoniques, et hop ;
  • la violence du constat fataliste devenu certitude désespérée et le plaisir triste qui consiste à le remâcher sans cesse, via les
    • itérations,
    • répétitions,
    • réexpositions et
    • analepses au goût de refrain ;
  • l’acceptation du tragique de notre condition et la révolte qu’elle peut susciter parfois, que laisse deviner l’explosion qui secoue l’ostinato au tiers du parcours ; et
  • la trilogie psychique associant
    • le désespoir intérieur, lisse donc d’autant plus prompt à nous engoncer dans sa vase, que figure peut-être le perpetuum mobile,
    • le chaos qu’il suscite en nous lorsque nous nous laissons aller à être lucides et que paraissent esquisser accents et contretemps, et même
    • le soulagement que peut représenter la Fin, marquée par les coups de canon de la coda.

Ainsi s’achève une partition

  • passionnante,
  • imagée,
  • vibrante,
  • créative,
  • agencée avec art et
  • tirant le meilleur à la fois du piano qu’Orlando Bass maîtrise à la perfection et du saxophone pour lequel il a beaucoup écrit donc sur lequel il a sûrement beaucoup échangé avec ses interprètes.

Pas de doute :

  • la précision d’exécution,
  • le souci d’expressivité et
  • la polychromie du rendu

valorisent tant le compositeur que les interprètes, à l’évidence tout à leur affaire dans cette musique de haute couture. Hâte de découvrir les deux dernières propositions, à commencer par celle de Vicent David – à retrouver sur ces pages presque bientôt.

 

Irakly Avaliani joue Frédéric Chopin – 3/6

Première du disque. Visuel : Masha S.

 

Après la barcarolle op. 60 et les trois nocturnes tubesques, faute de légitimité critique bien établie, on est allé quérir quelques épithètes de bon goût chez les Sachants pour évoquer la Polonaise-Fantaisie en La bémol de Frédéric Chopin, dont le storytelling rappelle qu’elle a été composée peu après que le lover a brisé là avec George Sand. “Dosée, marmoréenne, tendre et intrépide” seraient son horizon idéal d’après les Experts de France Musique. Souvent emballée sur YouTube en douze ou treize minutes, elle dépasse le quart d’heure sous les doigts d’Irakly Avaliani (même si la quatrième de couverture s’emballe en l’annonçant à 16’41 au lieu de 15’41 au compteur). Comme on n’a pas trop d’inquiétude sur la virtuosité du zozo, on se réjouit de passer un peu plus de temps que prévu en sa compagnie musicale.
L’allegro maestoso associe

  • solennité des accents graves,
  • onirisme des arpèges aspirés par le suragiu et
  • mystère d’un prélude posé en apparence plus qu’en tonalité.

S’y substitue un “tempo giusto” a priori tonique et solaire. Le pianiste en fait entendre

  • l’apparente gaieté,
  • les tensions (changements
    • d’intensité,
    • de tempo et
    • d’agogique) et
  • l’allant empreint de contradictions
    • (octaves potentiellement bondissantes à main gauche,
    • chromatismes descendants,
    • frictions rythmiques associant
      • contretemps,
      • associations, oppositions et complémentarité entre binaire et ternaire, ainsi que
      • débordements par l’élargissement de la mesure par
        • la pédalisation,
        • les points d’orgue sur les respirations et
        • l’agogique).

Le discours hésite entre

  • suspensions,
  • emportements et
  • tonalités.

Le motif des quatre notes répétées

  • nourrit,
  • unifie et
  • relance

un développement plus rhapsodique que prévisible. Irakly Avaliani en rend les oscillations de couleurs par

  • un toucher protéiforme,
  • une habile organisation d’une mesure assez libre pour associer çà 3/4 et 9/6, et
  • un équilibre global offrant, selon la circonstance d’accompagner les changements (par exemple de tonalité) et de laisser l’auditeur s’en étonner (certaines modulations ne sont pas piquées des hannetons, comme on disait quand il y avait des hannetons), selon que la note de bascule – quasiment la blue note – est valorisée ou non.

Les tourments de l’inspiration ne sont donc pas exprimés par

  • l’usage du forte (rare chez cet interprète),
  • la mise en avant du brio quand les notes se bousculent ou
  • les stratégies Stabylo bien connues
    • (contrastes,
    • élargissements appuyés façon wagon de grand huit avant une descente vertigineuse, voire
    • précipitations).

Le musicien préfère la musicalité à la frime. On se laisse d’autant mieux saisir par Chopin qu’Avaliani ne fait pas le beau : il fait du beau ; et la polonaise-fantaisie profite à plein

  • de son art du ralenti frappant d’évidence,
  • de sa science de la progression nuancée, et
  • de sa conception holistique du temps, qui permet au son
    • de respirer,
    • de résonner,
    • de se bousculer ou
    • de réguler métronomiquement le texte.

 

 

Aussi le passage en Si et Si bémol sonne-t-il avec

  • l’intériorité pudique,
  • la gravité lumineuse et
  • la profondeur équivoque

qui lui conviennent. Sans désamorcer toute surprise, le porte-voix du compositeur nous guide dans le labyrinthe

  • tonal,
  • rythmique (un 6/8 éphémère surgit là à la main gauche comme pour explorer encore une autre voie disponible dans la limite du 3/4) et
  • expressif

d’une partition tournoyante.

  • L’élégance de l’arythmie
    • (régularité / agogique,
    • binaire / ternaire,
    • mesuré / trille),
  • la fulgurance des nuances,
  • l’émouvante pertinence des attaques

ne peut que bouleverser celui qui, au lieu d’entendre, écoute. Parfois, des curieux me demandent si, avant de dire que c’est wow, j’ai ouï les versions de leurs poulains préférés. Franchement, qu’est-ce qu’on s’en tampiponne ? La musique n’est pas concurrence, elle est connexion entre

  • un texte,
  • un interprète et
  • un auditeur.

Ici, ce que je veux raconter, ce n’est pas le critère de perfection consensuelle, c’est pourquoi je pense que les curieux auraient profit personnel à verser (ou non, oui en l’espèce) une oreille dans cette histoire.

  • Ni payé par l’attaché de presse,
  • ni rémunéré par l’interprète,
  • ni encouragé par un label (certains en pourraient témoigner),

je raconte des histoires ; qui s’y connecte les suive et, surtout, se risque à glisser une esgourde sur le travail de l’artiste pour vérifier si lui aussi connecte. En l’espèce,

  • récurrences,
  • remotivations du 3/4 en 18/8 puis 9/4 à dextre avec rythme pointé à gauche,
  • fulgurances modulantes

sont supérieurement menées.

  • Fougue intérieure,
  • virtuosité extérieure,
  • émotion communiquée grâce à l’impossible et décevante osmose entre binaire et ternaire,
  • émouvante et vaine – à l’aune humaine –  espérance de l’accord parfait final

animent cette version. Peut-être pas

  • marmoréenne et
  • tendre et
  • intrépide et
  • dosée et
  • je sais pas ce qu’il faut pour francemusiquer,

mais

  • pensée,
  • propulsée,
  • intelligente et
  • émouvante.

Bon, d’accord, pour les mazurkas qui nous attendent, on ne cherchera pas la solution critique ab initio. Mais, franchement, pour un tel monument, fallait tenter de regarder le “Profil / Hatier” de l’œuvre, non ?

 

À suivre…


Pour écouter l’intégralité du disque, c’est par exemple ici.

 

Un projet d’optimisme partagé

Au théâtre du Gouvernail (Paris 19), le 26 juin 2024. Photo : Rozenn Douerin.

 

La chanson avec du texte dedans permet de traiter de sujets aussi graves et violents que le travail. Elle peut aussi aider à lutter contre ce fléau. C’est le socle éminemment optimiste de cette chanson créée le 26 juin au théâtre du Gouvernail.

 

 

Théo Boulakia et Nicolas Mariot, “L’Attestation”, Anamosa – 1/2

Détail de la première de couverture

 

Un livre peut-il être d’autant plus intéressant que sa lecture est parfois ardue ? Peut-il traiter d’un sujet passionnant… et révéler que le plus passionnant n’est peut-être pas tant son sujet que la manière dont il s’en empare ? Après découverte du texte, voilà deux questions que pose L’Attestation. Une expérience d’obéissance de masse, printemps 2020, publié aux éditions Anamosa en 2023 par Théo Boulakia, normalien et alors doctorant en sociologie, et Nicolas Mariot, sociologue et chercheur au CNRS. Au cœur du livre – un objet joliment façonné, avec couverture à rabats et papier de qualité – explorant le premier confinement, un moment étrange qui a mêlé

  • la réalité,
  • les fantasmes et, surtout,
  • l’opportunisme politique

suscités et permis par le coronavirus, battent pourtant d’autres questions, telles que :

  • comment enfermer et faire obéir une population habituée à la souplesse d’une République réputée démocratique ?
  • comment mesurer a posteriori l’efficacité sanitaire et les conséquences humaines de cette séquence ?
  • quelles traces a laissé une telle expérimentation de fracassage – et hop – des libertés publiques ?

C’est ce que nous évoquerons dans ce compte-rendu libre en deux épisodes et cinq chapitres.


1.
Penser le confinement

 

Habilement, les auteurs commencent par interroger leur objet d’étude en contrant une évidence : le confinement n’existe pas. Le terme recoupe des réalités très dissemblables, tant au niveau mondial qu’au niveau européen (ils montreront plus tard que la réalité est aussi dissemblable au sein du territoire national). Si la logique française se distingue des procédures appliquées à Wuhan, elle n’en participe pas moins d’une “amplification de mesures autoritaires, de répression des conduites déviantes et de justice sommaire” (30). L’examen comparatif relève deux faits. D’une part, les mesures de confinement sont souvent révélatrices de réalités sous-jacentes et parfois invisibilisées, notamment en ce qui concerne la remise en cause des libertés publiques. D’autre part, elles accentuent des mesures liberticides présentes auparavant, au point qu’il est possible de “penser l’état d’urgence sanitaire comme prolongement de l’état d’urgence antiterroriste” (30). En ce sens, le confinement, c’est-à-dire l’interdiction de sortir de son domicile

  • pour une durée variable,
  • totalement ou par intermittence,
  • avec ou sans exceptions au périmètre envisagé

est un révélateur et un amplificateur. En témoigne l’instrumentalisation du confinement tant par les États (frappant est l’exemple de l’Inde tenue par l’intégriste Narendra Modi) que, localement, par des mafias, toujours sous le prétexte altruiste de prendre soin de la population. Divers outils constitués par les auteurs confirment un pressentiment : “Les États les plus répressifs en temps ordinaire ont le plus fermement bouclé leurs citoyens” (44). Plus généralement, “l’enfermement est moins le produit de bonnes intentions que de vieilles habitudes” (49). Surtout, d’un point de vue sanitaire, les études concluent que “les stay-at-home orders étaient peu ou pas utiles”. Pourquoi donc l’Espagne a-t-elle décidé d’un confinement très strict et pas les pays scandinaves ? Outre la part d’irrationalité constitutive de la plupart des décisions, la question des habitudes sociopolitiques et de l’acceptabilité d’un élargissement des pouvoirs policiers peut se poser… quitte à ce que l’État de droit reprenne la situation en mains a posteriori en déclarant le confinement inconstitutionnel, comme en Espagne. Les auteurs n’en conseillent pas moins de “passer la prochaine pandémie au Danemark ou au Japon” (81), moins prompts à fomenter des confinements sévères.
Une évidence s’impose : le confinement en tant que tel n’a pas eu d’impact positif mesurable sur la mortalité en général et la morbidité liée au coronavirus en particulier Certes, l’on pourrait arguer que ce fait n’a pu être évalué qu’après coup. Cette hypothèse induirait que l’on ne saurait reprocher leurs décisions délétères aux gouvernements et à ses coquins, notamment sachants – perdus ou arrivistes – et cabinets de conseil. Prudence serait mère de sûreté. En réalité, les auteurs montrent que,

  • d’une part, cette “prudence” est à géométrie variable, et que l’importance des limitations prudentielles n’est pas corrélable à l’importance de la pandémie, autrement dit que la question de la compétence des experts et des décideurs ne saurait être balayée comme un non-sujet mais devrait, au contraire, être examinée avec rigueur (à l’arrivée, beaucoup ont démontré une incompétence qui a été très dommageable aux citoyens) ;
  • d’autre part, quelle que soit la méthodologie utilisée, et les auteurs en proposent plusieurs, la mortalité liée au Covid n’est pas mesurable pour au moins deux raisons.
    • La première raison est que la notion de mortalité liée au Covid et utilisée comme argument-massue par les gouvernements confineurs achoppe sur une définition qui n’est pas la même dans tous les pays (mourir avec le Covid, est-ce mourir du Covid, par exemple ?) ;
    • la seconde raison est que la pandémie a surtout tué des personnes âgées à cause
      • d’une prise en charge dégradée,
      • d’absences de mesure et d’équipement de protection dans les établissements de soins, et
      • peut-être aussi de la brisure du lien entre les vieux, qu’ils soient résidents d’Ehpad, hospitalisés ou chez eux, et l’extérieur, brisure précisément exigée par le confinement.

 

2.
Penser le confinement français

 

Théo Boulakia et Nicolas Mariot ont beau prendre le soin d’éviter toute ironie ou toute tentation pamphlétaire qui pourrait leur valoir l’infamante appellation de complotistes, terme d’autant plus stigmatisant que sa vacuité transforme l’invalidation qu’elle sous-tend en sparadrap du capitaine Haddock, ils ne peuvent pas éluder la prise de parole de Sosotteur Ier de la Pensée complexe faisant sans vergogne, le 6 mars 2020, la promotion d’un spectacle de son pote promoteur en appelant les Français “à ne pas changer leurs habitudes de sortie”, huit jours avant les premières mesures de restriction (85). Le 16 mars, ce même individu décrétait la mise en place d’un régime d’exception, et l’engrenage des restrictions s’accompagnait promptement du lancement du tube de l’année 2020 : l’attestation.
Si celle-ci est le sujet du livre, les auteurs ont eu raison de contextualiser son apparition, car on comprend mieux pourquoi ce papier n’est en rien ce qu’elle prétend être, id est la marque de responsabilisation du citoyen dans un contexte dramatique. En effet, quand nous signons une “attestation de déplacement dérogatoire”, nous acceptons que la même autorité qui nous oblige à rester chez nous nous autorise à en sortir sous conditions. Signer l’attestation, c’est reconnaître que, dehors, je ne suis pas libre mais régi par la même pression réglementaire que lorsque je suis à mon domicile. Autrement dit, l’attestation ne me responsabilise pas, elle se contente de me rappeler que je ne suis pas libre.
C’est tout sauf un détail. L’idée forte est d’ajouter une contrainte à la contrainte. Je suis contraint de rester chez moi ; et, si l’on m’autorise à sortir, cette sortie elle-même est une contrainte car je m’expose à des sanctions soit en fraudant sciemment, soit en étant victime d’une interprétation policière qui me transforme en contrevenant. Le spécialiste des discothèques qu’était le ministre Christophe Castaner l’a explicité, l’attestation participe du projet consistant à “pénibiliser chaque sortie” (son big boss assumera son plaisir malsain d’emmerder les Français, lesquels – espère-t-on – ont hâte que la réciproque lui arrive en pleine mouille). En témoigne la substitution de l’horodatage à l’honneur que chaque promeneur engageait dans la formulation initiale de l’attestation (105) : l’honneur est difficile à cerner par un agent de police, l’horaire reste davantage à sa portée.
Il s’ensuit que le procédé d’attestation est bien un “dispositif disciplinaire dont l’objectif vise d’abord à fournir aux contrôleurs les informations dont ils ont besoin pour surveiller et punir” et ce, avec la complicité de celui qui a signé l’attestation et peut donc se trahir, parfois à son insu tant, comme le révèlent les zélotes en uniforme prompts à dégainer leurs carnets d’amendes,

 

les mentions portées sur l’attestation condensent une myriade d’interdits cachés : interdiction de faire du sport [même de la marche rapide] en tenue de ville, de faire ses courses avec son chien, de promener un chien à plusieurs, de faire ses courses en tenue de sport, de rentrer du travail autrement que par le chemin le plus court, etc. (113)

 

Autrement dit, “l’autocontrainte n’a rien d’une impulsion du for intérieur ou d’une disposition privée” et tout d’un “dispositif de surveillance” qui amène les individus à se dédoubler : ils sont à la fois ceux qui s’autorisent à sortir et ceux qui tendent à ces chères forces de l’ordre la verge pour se faire battre. Ainsi, à travers

  • l’attestation,
  • les interprétations à géométrie variable que les vaillants agents de la maréchaussée font des très nombreux
    • décrets,
    • arrêtés et
    • règlements en vigueur,
  • les couvre-feux institués aux niveaux national et local,

les auteurs montrent avec précision comment les systèmes de contrôle et de contrainte se superposent jusqu’à la caricature – et ce, moins pour assurer la sécurité sanitaire des Français que pour contrôler les individus et les enfermer chez eux. Comment interpréter autrement la lutte de Michel Veunac, maire de Biarritz, pour “empêcher la station assise de plus de deux minutes sur un banc public” afin de contrer ces mauvais citoyens qui “s’installaient pour lire un bouquin ou regarder l’océan”, les criminels ? On se réjouit que ce petit monsieur qui n’aimait pas les lecteurs contemplatifs et que le livre omet de citer, ait été battu aux élections municipales quelques semaines plus tard et, quelques mois après, sévèrement mis en cause par la Chambre régionale des comptes. Exemples et calculs à l’appui, Théo Boulakia et Nicolas Mariot montrent que l’efficacité de cette prolifération d’interdictions est nulle et déconnectée de la “situation locale”, prétexte chéri des édiles pour montrer leur soumission au gouvernement et rajouter une couche sur les menaces nouvelles visant à effaroucher le pékin ou à le rendre fautif grâce à son ignorance du mille-feuilles de contraintes qui encadre désormais son existence.

 

À suivre !

 

Carlos Zaragoza et Kishin Nagai, “Five verses” (IBS) – 2/5

Première du disque

 

Sera-ce le compositeur grâce auquel la musique presque récente est censée paraître supportable ? Après le disque fascinant de Rachel Koblyakov qui circonvenait ses auditeurs éventuellement frileux en glissant une sonate de Paul Hindemith avant des œuvres plus proches de nous mais pas forcément des auditeurs de Radio Classique, voici que Carlos Zaragoza et Kishin Nagai font succéder une sonate de Paul Hindemith à un cycle de mélodies d’André Caplet avant d’entrer dans l’autre vif du sujet – trois pièces créées sur mesure par des compositeurs sempervivens.
Certes, comme pour Caplet, le titre est mensonger : la sonate n’est pas plus écrite pour saxophone alto que Le Vieux Coffret, même si les saxophonistes l’ont souventes fois fréquentée. Elle est destinée au pichotte, mot qui désigne, comme chacun sait, cet étrange instrument qu’est le saxhorn alto. Mettons cette entourloupe sur le compte de la simplification, et passons au meilleur moment du projet : l’écoute.

 

 

L’affaire s’ouvre par un bref prélude oxymorique car intitulé “ruhig bewegt” soit “tranquillement agité”. Le compositeur y associe

  • un balancement inquiétant en 6/4,
  • une mélodie difficile à cerner et
  • une harmonie complexe qui ne se résout pas à trancher en faveur d’une tonalité d’attache.

L’attention est alors captée par

  • les effets d’écho qui relient les complices,
  • les entraves qui modèrent les tentatives d’envolées du saxophone, et
  • le travail sur le souffle auquel s’attache Carlos Zaragoza
    • (tenues,
    • nuances,
    • vibrato modéré).

 

 

Le deuxième mouvement, en 2/2, est “vif” et contiendrait, selon le livret, une séquence en morse faisant allusion à la devise d’un peintre de la Renaissance nous apprenant que “personne ne peut tout savoir”. Kishin Nagai y déploie quelques-unes de ses qualités de pianiste accompagnateur :

  • variété des couleurs,
  • écoute du partenaire pour répondre dans la même dynamique d’intonation, et
  • science du toucher lui permettant de passer d’une réplique de soutien à une intervention incisive relançant le discours.

Le mouvement devient tour à tour

  • sautillant,
  • grinçant et
  • mystérieux quand surgissent les épisodiques mesures à cinq temps (le moment morse, sans doute).

De la sorte,

  • la variété rythmique,
  • la richesse harmonique et
  • l’inventivité musicale (quelle partition pour piano !)

mettent en valeur

  • la précision des interprètes,
  • leur capacité à jouer ensemble et non juste en même temps, ce qui n’est pourtant déjà pas si simple, ainsi que
  • l’art du compositeur à exploiter les possibilités du duo
    • (synchronisation,
    • soli,
    • voies divergentes, etc.).

Dire que l’on s’en pourlèche les babines auriculaires, et hop, est une litote. Une curieuse litote, je le concède, mais une litote.

 

 

Le troisième mouvement est indiqué “très lent”. Il est composé de quatorze mesures, pas une de plus – sinon, j’aurais écrit “quinze”, très probablement. Le dialogue entre saxophone et piano est notamment marqué par

  • des séquences de trois notes aisément caractérisables quoique égrenées selon un rythme variable,
  • un contrechant par lequel le clavier tâche d’habiller cet intermède volontiers disjoint, et
  • un dernier accord de Mi bémol qui surprend après deux minutes énigmatiques et suspendues.

 

 

Le quatrième mouvement s’ouvre sur un poème censé être récité par les musiciens. On peut regretter que le duo n’en propose pas un arrangement conforme à la version pour saxophone, puisque le texte s’attarde au premier chef sur la puissance évocatrice de la sonnerie du cor – instrument auquel était originellement dédié la sonate – pour nos âmes fatiguées, à quoi le pianiste répond :

 

L’ancien n’est pas bon sous prétexte qu’il n’est plus,
pas plus que le nouveau est délectable parce que nous le vivons ;
nul n’a éprouvé de joie surpassant
ce qu’il peut éprouver ou comprendre vraiment.
Voici ton devoir, par-delà la confusion, la précipitation et le brouhaha :
saisir ce qui dure, saisir le calme, saisir le profond,
et le dénicher encore afin de le conserver et de le chérir.

 

En réalité, les musiciens ignorent purement et simplement cette partie parlée pour laisser Kishin Nagai se ruer sur la danse à 9/16. Défaut de maîtrise de la langue allemande ? Bah, une traduction dans la langue de chacun des artistes aurait pu se justifier, et justifier elle-même la présence de la sonate dans un disque revendiquant d’associer poésie et musique.  On aurait néanmoins mauvaise grâce de bouder ce moment explosif et sautillant. En effet,

  • énergie,
  • swing,
  • nuances et
  • attention au phrasé

animent une gigue – aussi survitaminée que les photographies de Jean-Baptiste Millot – avec

  • efficience stylistique,
  • maîtrise technique et
  • sens du groove.

Surfant sur la nonchalance souvent caractéristique du saxophone alto, Carlos Zaragoza rejoint son compère pour une valse lente à 6/8 que Paul Hindemith finit par superposer avec la danse de Saint-Guy initiale.

  • Brio de la composition,
  • chaleur surplombante du bois,
  • virtuosité tonique du clavier

concluent avec art cette préparation aux trois étapes que nous aborderons prochainement, à commencer par une création d’Orlando Bass qui a donné son nom au disque, Five verses.

 

Irakly Avaliani joue Frédéric Chopin – 2/6

Première du disque. Visuel : Masha S.

 

Après la barcarolle joyeuse-et-pas-que qui ouvre son récital Chopin, Irakly Avaliani n’hésite pas à – pardon pour ce jargon technique – envoyer du pâté, via trois nocturnes. En effet, nul n’ignore qu’il existe deux sortes de morceaux de musique :

  • les hyperconnus et
  • les autres.

Les deux premiers nocturnes de l’opus 9 ressortissent sans conteste possible de la première catégorie – et le troisième nocturne choisi par l’artiste est lui aussi un golden hit.

 

 

Le numéro 1 est un Larghetto en si bémol mineur, mesuré à six noires par mesure. Irakly Avaliani choisit donc un tempo plutôt allant (c’est pas un largo, c’est plus léger que ça) qui a l’avantage de valoriser le swing du double balancement de six croches qu’aèrent les grupetti de sept, neuf ou onze notes. Ainsi, le charme

  • d’un clavier cristallin,
  • d’une pédalisation rigoureuse et
  • d’une agogique habilement limitée

a toute latitude pour opérer. On goûte

  • l’égalité des basses,
  • le souci d’une régularité qui n’est jamais corsetée mais évite à l’interprète de se vautrer dans le rubato réservé (dans le meilleur des cas) aux concerts de croisière,
  • la perfection des octaves,
  • le naturel des modulations, ainsi que
  • l’apparente liberté de la mélodie que paillettent

    • grupetti,
    • trilles et
    • inégalités.

Les nuances sont concentrées, de sorte que l’on n’en goûte que mieux les variations admirablement tuilées. La prise de son de Joël Perrot magnifie l’excellence d’un jeu qui, jusqu’à la lumineuse fin en Si bémol, se révèle davantage

  • sensible que sentimental,
  • réfléchi que flashy,
  • médité qu’explicitant.

Pour ceux qui préfèrent les questions aux réponses (autrement dit : pour les gens fréquentables), voici une version délectable.

 

 

Le deuxième nocturne de l’opus garde presque le même format, troquant le 6/4 pour le 12/8 (en clair, c’est toujours du ternaire mais pas le même). La grande modification est que, cette fois, on est en Mi bémol majeur, donc par essence dans un mood plus joyeux que pour le précédent nocturne. Quitte à capter des bruits parasites insistants en début de nocturne, la prise de son semble entrer dans la fabrication même du son (si) tant Irakly Avaliani parvient à gommer la percussivité a priori consubstantielle au piano.

  • La basse est posée,
  • l’harmonie comme gracieusement évaporée à peine a-t-elle été esquissée,
  • la mélodie est à la fois liquide et aérienne,
  • le spectre des nuances piano est d’une richesse fascinante (jusqu’à l’incroyable triple piano final),
  • la pédalisation fait rayonner le son sans le flouter,
  • le rubato injecte dans la troisième exposition et la coda ce qu’il faut de souplesse pour éviter la sensation de redite,
  • l’usage de l’agogique est très ténu, se contentant çà et là de laisser un fin courant d’air jouer dans le voilage de notre imagination.

En dire davantage serait en dire trop, donc mal ou pis, selon les goûts.

 

 

Le troisième nocturne de l’opus 9 est omis au profit du deuxième nocturne de l’opus 27 en Ré bémol (le huitième du genre dans le catalogue chopinistique). On reste dans le groove ternaire, la mesure formant manière de synthèse des deux précédentes : après

  • le 6/4 et
  • le 12/8, voici venu
  • le temps du 6/8.

Le pianiste a-t-il décidé de le caractériser hautement, voire avec un geste radical ?

  • Loin des versions extrêmes expédiant la partition en 5′,
  • loin aussi des interprétations habituelles autour des 6’10,
  • Irakly Avaliani avance sa version du Lento sostenuto en 6’25.

On comprendra plus tard – redoutable teasing visant à inciter à la lecture intégrale du post, tout ici est machiavélique – pourquoi ce n’est pas la lenteur qui saisit ici mais un sentiment

  • de paix,
  • de tranquillité voire
  • de bien-être.

Des agités du bocal de mon espèce pourraient craindre que cette impression soit synonyme de torpeur ou d’ennui. Alors, impavide, le musicien puise dans la partition de quoi dissiper nos craintes en ciselant singulièrement le rythme par la manière dont il

  • asseoit les premiers temps offerts à la basse,
  • égrène la régularité des doubles croches de la main gauche,
  • habite, par-delà son apparence de calme et de placidité, les embardées de la main droite

    • (appogiatures,
    • grupetti,
    • notes tenues,
    • rythme pointé,
    • phrasés spécifiques,

le tout pouvant se cumuler). On demeure ébaubi par

  • l’expressivité des piani,
  • la précision des touchers et
  • l’art
    • de jouer “con forza” sans forcer,
    • de moduler avec naturel,
    • d’articuler sans dégingander.

Quand le nocturne s’emporte, Irakly Avaliani sait habiller le thème principal d’une tonicité nouvelle. Quand l’œuvre hésite entre retour au calme et nouveaux emballements, il parvient à substituer une couleur à une autre instantanément ou progressivement, selon ce que sous-tend le texte. Sous ses doigts,

  • le cristal des suraigus tinte,
  • la basse demeure inébranlable, et
  • les derniers septolets injectent en toute discrétion cette dernière dose de peps qui rend la tranquillité supportable.

De la belle ouvrage qui justifie les dix secondes de silence glissées après la musique – l’interprète a donc respecté la durée canonique d’exécution. En revanche, il offre à ceux qui écoutent le disque en continu une respiration indispensable après ces trois tubes – d’autant plus indispensable que nous attend à la prochaine piste la remuante – c’est un euphémisme – polonaise-fantaisie que nous dégusterons dans une notule à venir avec les lecteurs qui nous font l’amitié ou la curiosité, voire les deux, de partager ces crash-tests !

 

À suivre…


Pour écouter l’intégralité du disque, c’est par exemple ici.

 

Dans le miroir

Pierre-Marie Bonafos au théâtre du Gouvernail (Paris 19) le 26 juin 2024. Photo : Rozenn Douerin.

 

Après quatorze ans de scène, quand tu composes un tour de fredonneries, tu peux mêler

  • chansons vintage,
  • chansons rares et
  • chansons inouïes.

En deuxième position du récital du 26 juin, j’avais donc choisi de glisser une vieille chanson en l’updatant partiellement : non, je n’enseigne plus en université mais, oui, si Dieu ou whoever me prête vie, j’aurai tantôt cinquante ans. Avec le souffle et l’intuition de Pierre-Marie Bonafos, let’s rock it!