Fruits de la vigne – Romain Guiberteau, Saumur blanc 2020

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Photo : Bertrand Ferrier

 

En viticulture comme en musique, les maîtres réels ou usurpés valent souvent caution. En l’espèce, pour avoir travaillé au Clos Rougeard, domaine de la Loire dont les bouteilles s’évaporent pour plusieurs centaines d’euros, Romain Guiberteau bénéficie d’une réputation flatteuse qu’il s’applique à confirmer depuis près de trente ans dans sa propriété de 17 hectares autour de deux cépages : chenin blanc et cabernet-franc. C’est le premier nommé qui nous intéressera aujourd’hui, avec une quille de blanc vendue fin janvier 2024 pour la somme – aussi coquette que rondelette – de 23 € aux Galeries Lafayette. (Certains sites proposent ce produit à 18 € hors frais de port, mais leurs stocks semblent largement épuisés.)
La robe de cette cuvée “Domaine” de 2020 est d’un bel or pâle. La lumière s’y reflète avec délicatesse. L’ensemble du tissu liquide affiche une émoustillante unité.
Le nez décline des fragrances agrumées (je tente), peut-être spécifiquement de bergamote. Il y a de la franchise, de la finesse et de la discrétion dans ce qui caresse nos naseaux.
La bouche est d’abord happée par une attaque beurrée. Cependant, elle convoque assez vite des notes hésitant entre orange et pamplemousse qui remontent plaisamment dans le tarin. Dès que l’on prend le temps de laisser œuvrer le jus, on apprécie itou sa persistance bienvenue.
Le mariage avec des filets de lieu noir accompagnés d’un riz sauce moutarde est une réussite logique. L’acidulé du vin flatte le mets qui, en retour, permet d’apprécier la rondeur beurrée de son comparse. Bref, en quelque sorte,

 

On boit un verre de vieux ciel
On trinque
avec le petit dieu des fourmis
Un arbre dort dans ses branches
sans délacer ses souliers
(Serge Pey, Mathématique générale de l’infini, Gallimard, “Poésie”, 2018, p. 225).

 

Heaven (and hell) can wait, nous sommes encore de ce monde, prêt pour d’autres dégustations.