Orlando Bass, “Préludes et fugues”, Indésens – 1/8

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Première du disque

 

De temps en temps, ça lui prend et, ni une, ni deux, Orlando Bass décide de passer de grands concours, au clavecin ou au piano. Souvent, il les gagne voire les écrase comme l’an dernier, quand il a raflé quasi tous les prix du concours Olivier Messiaen. En 2016, il a glané le grand prix du concours-festival centré sur le répertoire pianistique moderne, ce qui lui a valu d’enregistrer ce disque au programme démoniaque, qui arrive enfin sur notre gramophone pour être chroniqué. Sur la set-list (presque) que des préludes et fugues, huit en tout, composés entre 1910 et 2016 et prolongeant un genre qu’Orlando Bass, un peu généreux, fait remonter à 1508.
Le disque commence par le diptyque d’Amy Beach, composé en 1917. On connaît le sort de la dame, pianiste mise sous le boisseau pendant son mariage, compositrice frénétique après la mort de son époux, en 1910. L’opus 81 s’ouvre “maestoso, quasi improvvisazione”, avec l’inscription en équivalents-notes d’A. Beach et… quatre portées.

  • Résonance,
  • gravité,
  • virtuosité,
  • échos rachamaninoviens

marquent la première partie du prélude. À cet épisode, dont Orlando Bass rend avec art la tension “pesante” et riche de couleurs sombres, succède une partie plus élégiaque qui réexpose le motif-signature de la compositrice. Cette fois, l’égrenage des doubles en triolet évoque davantage Chopin, même si les trouvailles harmoniques déjouent bientôt la comparaison.

  • Chapelet hypnotisant de tierces,
  • exploration habile des registres médiums et aigus,
  • contrastes
    • d’intensités,
    • de rythmes et
    • de dynamiques

captent tour à tour l’attention.

  • Mutations tonales,
  • suspension des traits,
  • travail sur les oppositions de vitesse donc de caractère

achèvent d’ébouriffer le prélude dans le calme. Le motif-signature sert de premier sujet à une fugue au chromatisme serré dont Orlando Bass rend parfaitement nette la polyphonie classique.

 

 

  • Jeu avec le ternaire,
  • variations brusques ou progressives des nuances,
  • mélange des humeurs,
  • mutation progressive de la croche à la double bondissante

démontrent, chez la compositrice comme chez l’interprète,

  • un métier très sûr,
  • un goût remarquable et
  • une vision musicale qui sait transfigurer la forme obligée (et choisie) par
    • l’inventivité,
    • la maîtrise artisanale et
    • une haute confiance dans les bonnes vieilles règles contrapuntiques qui, ainsi maniées, démontrent
      • leur efficacité,
      • leur fécondité et
      • leur potentiel jubilatoire,

autant d’effets souvent gommés par l’extrême exigence de l’exercice que compositeurs et interprètes ont parfois tendance à faire payer à l’auditeur parce que, boudu, faut bien se venger sur quelqu’un, alors pourquoi pas lui ? Ici,

  • la différenciation des voix,
  • la précision des octaves et
  • l’art de la pédalisation

articulent une interprétation brillante et énergique que sublime un finale pas-que-lisztien en La.

  • Magnifique,
  • malin,
  • captivant,

donc à suivre.


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