
J’ai toujours détesté les featurings. Notamment
- ceux, obligatoires, chez les grandes stars, pour promouvoir un autre poulain produit par le même fumeur de cigare ; et notamment aussi
- ceux, obligatoires, chez les petits chanteurs, pour qu’il y ait au moins une personne dans l’assistance, ou, top of the top, une personne qui attire une autre personne, même si tu dois l’inviter pour qu’elle économise dix putain d’euros.
En revanche, comme l’expliquait Dio, j’ai toujours aimé quand la musique solo se jouait à plusieurs, que ça devenait « you against the world ». J’aime me produire – au sens pécuniaire du terme – avec des acolytes choisis (j’avais écrit « des membres choisis », par la grâce de Dieu je me suis relu), qui acceptent de venir pour pas cher parce qu’ils savent que pas de budget, mais qui viennent parce que, ensemble, on raconte une histoire qui est à la fois un non-sens économique, ce qui est un oui-sens dans un monde ultralibéral, et un oui-projet artistique. Travailler avec Jann Halexander comme avec tous les zozos, quel que soit
- leur sexe,
- leur couleur de chemisette ou
- leur diplôme en licornisme,
qui, euphémisme, acceptent malgré leur talent et l’estime que je leur porte, de rogner sur leur valeur numéraire officielle pour embarquer dans une galère joyeuse, ressortit pleinement de ma phobie de l’hypocrisie de l’exercice. Avec Jann, je suis tranquille, je suis peinard, j’suis même accoudé au comptoir. Jann ne m’a jamais engagé comme pianiste parce que ses spectateurs seraient venus pour me voir (il est plus malin que moi mais pas assez con pour ça, vous êtes foufous) ; et je ne l’ai jamais invité parce que, à l’abri des Grands Médias, le zozo trace sa route dans le monde de la chanson cabaret
- en remplissant des salles,
- en tentant des trucs différents,
- en refusant de cliver ses projets artistiques-et-pas-que si différents les uns des autres
parce que nous sommes multiples, bordel, nous-sommes-mul-tiples ! De sorte que, pour la première de mon nouveau tour de chant, fomenté fin mai au théâtre du Gouvernail, j’avais envie d’inventer un duo avec lui qui soit un vrai duo. Ç’a donné ce remix de « C’était mieux avant » ; et comme Jann sait que je n’aime pas que mes invités scéniques fassent mon truc et s’exilent en coulisse (j’suis prétentieux mais pas assez pour ça), il a accepté de fredonner un de ses tubes enseguida. Bien sûr,
- c’est capté avec les moyens du bord, qui portent bien leur substantif ;
- c’est donné en one-shot sans résidence subventionnée par les milieux motorisés ;
- mais c’est de la chanson en direct, pour et avec les gens.
Ce sera sans doute plus perfectionniste à l’Olympia. Qui sait ?