Éclats de rires divins, première série : face à l’ennemi – 4/5

Collégiale Saint-Martin de Montmorency (détail) rosie par le soleil d’été, le 21 juin 2025. Photo : Rozenn Douerin.

Ce 21 juin 2025, en la collégiale Saint-Martin de Montmorency (Val-d’Oise), j’ai donné un récital autour des rires divins. Il s’ouvrait par une Suite fantasque improvisée autour de cinq rires de Dieu. Vient de résonner la troisième improvisation où le rire de Dieu se moque des hommes qui aspirent à se libérer de leur Créateur. J’ai décidé de prolonger ce rire qui préfigure le châtiment divin en le rapprochant du rire que ses ennemis inspirent à Dieu, et qui résonne régulièrement dans l’Ancien Testament. Pour cela, j’ai réutilisé plusieurs éléments impliqués dans la précédente improvisation tout en les modifiant plus ou moins légèrement :

  • le cornet résonne dès les premières secondes, mais il est inclus dans un plein jeu plus solennel ;
  • le motif que l’explicit de la troisième improvisation martelait est à nouveau impliqué, mais réharmonisé de façon multiple ;
  • le développement utilise peu à peu les quatre plans sonores (trois claviers + un pédalier), comme dans la dernière partie de la troisième improvisation, mais, cette fois, ceux-ci n’offrent que de légères différences d’intensité et de couleur.

La similitude entre l’impro 3 et l’impro 4, ici racontée, évoque la continuité du rire d’un Dieu pour qui les ennemis et les insolents ne sont que fétus de paille « car son jour arrive », comme le stipule le psaume 36, verset 13 ; les différences poursuivent la narration et évoquent d’autres aspects du rire divin.

  • En tournoyant obsessionnellement autour d’un motif, l’improvisation fait résonner la pérennité de la rhétorique du rire moqueur divin dans les textes vétérotestamentaires.
  • En corrompant petit à petit le leitmotiv, l’orgue tâche d’évoquer le moment où Dieu passe du mépris presque amusé à l’éclat de colère dévastateur – à nous,
    • dissonances,
    • claudications,
    • accélérations et
    • foucades.
  • En proposant une dernière partie plus déchiquetée, la musique évoque les essais et erreurs de l’homme pour se concilier Dieu ou se réconcilier avec lui.

La coda, explosive, propose un raccommodage triomphal : celui qu’a inventé le big boss et qu’a résumé saint Fulgence de Ruspe, dans une lettre lue pendant l’office du cinquième vendredi de Carême :

Quand nous étions encore ses ennemis, Dieu nous a réconciliés avec lui par la mort de son Fils.

Parce qu’elle associe le Nouveau Testament à l’Ancien, la Bible transforme la rhétorique très récurrente de l’ennemi de Dieu en une apologétique paradoxale de l’amour divin pour l’homme, au sens où le créateur pourrait détruire sa créature – il l’a démontré – mais choisit de lui offrir une voie de salut. En ce sens, le rire est la préfiguration de la résurrection autant qu’il a pu être décrit comme le prélude du châtiment. Telle est la réflexion – résolument

  • plus songeuse que rigoureuse,
  • plus pointilliste que scientifique,
  • plus onirique que théologique –

autour de laquelle

  • volette,
  • musarde et
  • butine

la quatrième improvisation de la Suite fantasque, dont voici un souvenir.

 

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