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24 h dans la vie d’une note

Cavaillé-Coll de Saint-Martin des ChampsMême quand il est en mauvais état, c’est toujours un plaisir de faire frétiller un Cavaillé-Coll pour commencer la journée.Basilique Saint-Denys, 29 novembre 2016Après quoi, il s’agissait d’affronter le mauvais temps et de… Ah non, y avait pas de mauvais temps. Tant mieux.Gonzalez écoloIl s’agissait quand même d’aller jouer un orgue très écolo. Et pourquoi pas ?20161129_205719Le programme se finissant par une soirée de “conseil artistique” pour le concert Komm, Bach! du 11 décembre, avec Yu Matsuoka à l’orgue de chœur et le Chœur Sans Frontières sous la baguette de son chef. Bref, on est tout simplement, simplement, un mardi soir sur la Terre.

Nouvelle vie

Heartland, réédition 2Même si, hic et nunc, PKJ m’explique que je ne peux plus traduire de livres pour filles parce que je ne suis pas une fille (sexisme, quasi racisme et découverte un peu tardive – ô scandale ! qu’attend la police pour s’activer ?), je me réjouis d’avoir vécu une époque où j’avais le droit de faire vivre des héroïnes du sexe sans devoir subir d’opération radicale. Bref, la réédition de Heartland continue, et c’est vibrionnant – couac je ne sois pas sûr de l’ézatitude du terme, mais bon.

Michel Bühler seurfe sur “La Vague”

Michel Bühler, "La Vague" (2016)Michel Bühler, fabricant de chansons depuis 1969, publie un nouveau disque, La Vague (rien à voir avec celle de Todd Strasser !), pour chanter encore et encore ses écartèlements évoqués tantôt. Écartèlement entre le plaisir des choses simples (un beau paysage, la sérénité, la convivialité de bistro, les p’tits pat’lins…) et la vie comme elle va (l’anglicisation, la désindustrialisation, la boboïsation, la montée des indifférences…). Écartèlement entre ses colères (contre l’universel parler yankee rappelant que “tout l’mond’ chante en ricain maint’nant / Tiens, mêm’ les Suiss’ all’mands”, Israël-le-jamais-nommé pour les massacres perpétuellement perpétrés à Gaza, la financiarisation et la marchandisation…) et ses peurs (de faire la promo de la nostalgie puisque « tout c’qui est fauché ne r’pousse pas », de vivre entouré de fachos pour partie inconscients d’être fachos, de cautionner la poubellification du monde et sa mise sous coupe par la phobie de l’autre). Écartèlement entre l’envie de laisser tomber (« me reste à suivre les nuages / J’ai plus rien à fair’ par ici »), l’ire d’essstrême-gauche qui prend le chanteur devant l’évolution de la société (« c’est donc ça, la modernité : / 1 % de voyous friqués / et le rest’ qui bêle, béat ? ») et l’obsession de continuer quand même (« à croir’ qu’avancer dans son âge, c’est un peu changer de pays », ce qui n’est pas pour déplaire à Bühler le voyageur).
Le nouveau disque du barde helvétique propulse ainsi chansons posées voire poétiques, chansons de colère intérieure et chansons énergiques parlées (« Ça me gonfle » et « Les idées » avec sa coda façon « C’est pas vrai » de Jean-Jacques Goldman), genre chansonnique très attendu par les fans du « Voisin milliardaire » et du tube absolu qu’est « Vulgaire ». Entre piano posé, guitare paisible ou finement rythmique de Laurent Poget, rugissements électriques, nappes de cordes synthétiques et accordéon de Stéphane Chapuis (pas forcément utiles à nos esgourdes), contrebasse de Mimmo Pisino et batterie de Mathias Cochard aussi discrètes que bienvenues, les arrangements de Gaspard Claus laissent se déployer les textes aux nombreuses trouvailles (rythmiques avec les vers brefs de “Soir d’août”, philosophiques avec les aphorismes qui ponctuent maints couplets, humoristiques grâce à l’ironie grinçante du zozo, incluant des enjambements parfaits pour les amateurs de com-/presseurs) avec une modestie louable, même si les habitués du chanteur auraient peut-être aimé çà et là, par petites touches, être surpris par des couleurs moins déjà-vues afin de pimper ce bon disque.
Cependant, l’essentiel est assurément que, sur des mélodies souvent simples et dans un cadre musical de bon aloi, le baladin d’outre-Alpes exprime avec vigueur et inspiration ce qui lui tient au cœur et fait vibrer une voix qui a descendu dans les graves, certes, mais reste parfaitement maîtrisée. En piste, donc, l’immigration qu’il appelle à défendre (« La vague »), les paysages allogènes qui, parallèlement au charme du pays vaudois ou du Montparnasse d’autrefois, le constituent depuis charmante lurette (« Images de Syrie » ; « La Casba » d’on ne sait où sinon que, dans cette petite cabane, « y a l’temps qui prend son temps » ; « Gaza, été 2014 »), l’amour qui vieillit heureux (« et cett’ nuit qui descend / et cette transparence / et nous dans le mois d’août »), l’espoir (marche solennelle invitant à « Semer la vie »), bref, une variété d’inspirations qui fleure autant l’antan, avec tout ce qui fait l’iconologie bühlérienne (village, café, monde ouvrier, couple idéal, étrangers bienvenus, éloignement du temps, chanson, etc., réunis dans « Rolf et Nicole »), que l’aujourd’hui et le demain (« La vie n’est pas à vendre », tonne le chanteur tout en dénonçant la rentabilisation dégueulasse du projet écologique via les récurrentes « éoliennes »). En quinze titres, tour à tour poétiques et rageurs, on vénère les bonheurs de naguère et de jadis, on rêve de préserver ce qui peut l’être encore tout en s’ouvrant à de nouvelles populations, et on ne se prive pas de se gausser des patrons chougnant à leur première chemise déchirée tandis que nul ne cherche à soulager les « Nouveaux pauvres » (« Nouveau, ça veut dire mieux / mais quand y a rien dans la gamelle, tu t’fous bien du neuf ou du vieux »).
Avec La Vague, Michel Bühler plaide pour une humanité plus désireuse de bonheur (moins celui de l’extase que celui de la paix et de l’euphorie qui saisit, parfois, quand on tend la main à l’autre, et pas forcément pour lui coller une gifle), avec son lot d’inquiétudes et de rages, que du progrès. Son plaisir de chanter et son savoir-faire d’auteur-compositeur sont assez malins pour que, que l’on partage ou non les convictions du troubadour vaudois, on apprécie cet engagement intact qui n’exclut ni le doute ni la musique – ces chansons parlant avant tout de chanson, c’est-à-dire de rencontres, d’émotions, de vie. Brrrref, en ouverture de ce récital de studio, par la bouche de Jean Junod, Michel Bühler lance : « Moi, c’que j’en dis ? Ben, j’en dis rien. » Nous, c’qu’on en dit, c’est que c’est bien ; et on ajoute que le CD est disponible sur le site de l’olibrius en version physique ou en version mp3 (beaucoup moins cher mais avec un son nettement dégradé).

Vincent Genvrin, Saint-André de l’Europe, 25 novembre 2016

Vincent Genvrin en galettesLe cadeau.
Que Herr Vincent Genvrin, titulaire de Saint-Thomas d’Aquin et de Saint-Nicolas-des-Champs, accepte de se bouger le popotin afin de sévir à Saint-André-de-l’Europe pour fêter la restauration de l’orgue… Que non seulement il nous offre un programme sur mesure mais que, en sus, il accepte les conditions rigolotes qu’impose l’économie spartiate d’un récital d’orgue dans une petite paroisse – sympa, hein, mais petite… Qu’il s’investisse dans ce projet, avec un professionnalisme et une motivation bleus faons… Qu’il arrache la tête aux auditeurs, même aux parents-à-enfants malpolis (si, quand t’as parasité tout le monde en laissant tes enfants bruiter en continu sous prétexte que l’organisateur tire les jeux de l’artissse et ne peut t’inviter à t’exfiltrer et que, en sus, tu donnes zéro euro pour la vedette qui tenta de te hisser vers moins de bassesse, c’est malpoli), grâce à un programme varié, conclu sur la rare Deuxième suite de Léon Boëllman, feat. son redoutable et hypnotique “Final – Marche”… Et que les éditions Hortus et leur mentor, Didier Maes, viennent nous offrir de quoi prolonger ces émotions à des tarifs plus que raisonnables… C’était chouette.

Dans la nuit, Vincent Genvrin bosse. (Photo : Alain-Christian Leraitre)

Dans la nuit, Vincent Genvrin bosse. (Photo : Alain-Christian Leraitre)

L’accord-du-jour était signé Manufactures Yves Fossaert.
Le matériel était fourni par le R.P. curé Alain-Christian Leraitre.
L’assistant principal était l’organissse Samuel Campet.
La réalisatrice de la vidéo live était Rozenn Douerin.
L’affiche était inspirée d’une création originale de Ludovic Nowicki pour Lefographie.
Beaucoup de bras ont aidé à tourner et retourner les chaises, à préparer les flyers, à…
Et une cinquantaine de spectateurs ont validé notre projet fou de faire entendre un orgue pas connu dans un répertoire beau mais pas putassier. C’est joyeux. Merci à tous, et rendez-vous vendredi 2 décembre 20 h, même lieu, même tarif (entrée libre), même diffusion sur écran géant, avec Pascal Marsault, virtuose titulaire de Saint-Ignace. Ça va zouker.

Ensembles Perspectives, Salle Colonne, 23 novembre 2016

perspectivesLa salle Colonne est pleine, ce 23 novembre, pour le concert événement du quintette vocal Perspectives, fondé, dirigé et animé par Geoffroy Heurard avec des chanteurs mimi tout pleins (une préférence pour le ténor stachu, so typical). Alors qu’ils peaufinent leur second album, tout juste enregistré, Mathilde Bobot, soprano et quasi sosie de NKM en moins sorcière, ouf, Marie Pouchelon, alto, Sean Clayton, ténor, Romain Bockler, baryton, et Geoffroy Heurard himself, baryton tirant avec gourmandise sur la basse, proposent un récital-concept intitulé « Songs of experience ». Le défi : explorer les expériences de l’amour, de la mort et du sacré, avec des œuvres, toujours consonantes, allant du seizième siècle à aujourd’hui. Fil rouge aussi lâche que prometteur !
Une première partie de dix titres interprétés devant pupitres offre – en trio, quatuor ou quintette – un éventail de chants tant sacrés (via deux pièces d’André Caplet) que profanes, incluant le ravissant « O Happy Eyes » d’Edward Elgar, mais aussi des arrangements bien troussés (« Die Nacht » de Franz Schubert, revisité par Philip Lawson, et des « Chansons populaires expagnoles » de Maurice Ohana, remixées par Vincent Manac’h). Cette diversité permet aux artistes de parler une langue musicale harmoniquement riche, qui se présente éclatée entre de multiples langues humaines (anglais, allemand, latin, espagnol, italien, bientôt portugais du Brajiou pour Marcos Valle, français et même pelche). La seconde partie, de durée équivalente à la précédente, soit environ demi-heure avec prise de risque du “sans partition”, revendique un côté plus « chanson », même si elle s’ouvre sur deux belles pièces d’Arthur Sullivan et d’Edward Elgar. Au menu principal, donc : Henri Salvador (et Bernard Dimey, le programme omettant de citer les paroliers…), Jacques Brel, David Bowie et des « chansons de cow-boys » traditionnelles. Les arrangements d’Étienne Planel et de « L. Larsen » (on suppose qu’il s’agit plutôt de Lloyd Larson) ou des deux sus-cités séduisent. Les couleurs musicales, jusqu’à présent « dépressives » selon l’expression de Geoffroy Heurard, disons entre gris clair et amande foncée, osent ici davantage conter fleurette à l’humour, ce que couronnent trois bis oscillant entre oiseau noir (celui de Paul McCartney, pas de Barbara) et facétieux blues instrumentalo-vocalistique.

Mathilde Bobot, Marie Pouchelon, Geoffroy Heurard, Romain Bockler, Sean Clayton (Ensemble Perspectives) à Colonne. Photo : Rozenn Douerin.

Mathilde Bobot, Marie Pouchelon, Geoffroy Heurard, Romain Bockler, Sean Clayton (Ensemble Perspectives) à Colonne. Photo : Rozenn Douerin.

Le critique peut bien pointer quelques ombres au tableau : tel grain de voix çà et là moins moelleux qu’espéré (l’acoustique de la salle doit jouer, y compris pour l’équilibre, quand le spectateur est situé au fond à cour) ; telle justesse parfois un peu juste, justement (probablement pour prouver que c’est du live, si tu veux de la perfection, t’as qu’à écouter le compact laser disque) ; telle prononciation hispanique semblant, peut-être à tort, plus exotique que vernaculaire, ou telle prononciation du français paraissant insuffisamment claire pour être 100 % intelligible (le baryton ne peut cependant être accusé de cette fautissime aux esgourdes d’un fan de chanson avec texte intégré) ; telle composition du programme qui aurait pu varier davantage les ambiances en première partie, afin de permettre au minichœur d’exprimer d’autres émotions que le feutré et le retenu (même si, de cette option, sourd un joli dégradé de nuances et de contrastes, moins spectaculaire que si le chromatisme était plus large, certes, mais plus subtilement musical) ; telle difficulté à se situer entre un ensemble classique – capable de chanter avec goût Michelangelo Rossi ou Thomas Tallis – et l’absolu « Cinq de cœur », pôle vers lequel le dernier bis tend évidemment (la seconde partie mériterait, certainement, un embryon de mise en scène que l’on imagine en projet)…
Reste l’essentiel : l’élégance du projet (et des tenues, même, dialoguant entre elles avec intelligence) ; la classe du mix’n’match ne sacrifiant pas l’art classique sur l’autel de la chanson, mais n’éteignant pas non plus la chanson sous le boisseau d’un lyrisme hors de propos dans ce répertoire ; le travail commun effectué et manifesté par une remarquable unité de respiration, et par des notes finales parfaitement éteintes ; le plaisir distribué aux spectateurs quand le savoir-faire de bons chanteurs frotte la polyphonie à son histoire et à ses extensions les plus plaisantes pour l’oreille, etc.

Le salut. Photo : Rozenn Douerin.

Le salut. Photo : Rozenn Douerin.

En conclusion, un bel ensemble dont l’évolution est à suivre avec intérêt, mais que l’on aura grande joie à écouter dès à présent, tant on le sent sur le fil entre respectabilité classique, envie de faire péter les codes et désir d’allier art savant et jubilation populaire… ou l’inverse. Oui, on a hâte de les voir s’encanailler, et de travailler en profondeur leur mise en scène et la scénarisation de leur propos – on croit supputer que cela les titille. Ce nonobstant, pour le moment, sans aucun doute, c’est cette alchimie en cours perpétuel de réalisation (cette tension est une marque de fabrique qui marquait déjà le premier concert de Perspectives, à Saint-André-de-l’Europe, il y a cinq ans) qui a su susciter le frisson de plaisir ayant balayé et rebalayé la salle Colonne ce 23 novembre. C’est aussi cette singularité fière de ses aspérités et puissamment assise sur un collectif sûr de ses ambitions qui motive le triomphe fait à l’Ensemble Perspectives pour son grand concert parisien de la fin 2016… et en attendant la sortie de son nouveau disque, que vous pouvez soutenir ici – même si, honnêtement, 150 € pour recevoir ladite galette paraît viser des donateurs un brin fortunés.

DIY

Flyer Vincent Genvrin rectoMagique ! Réalisez vous-même votre flailleur pour le récital sekspsionnel de Vincent Genvrin en contrecollant les deux photos de ce post. Bravo, et rendez-vous vendredi !Flyer Vincent Genvrin - set-list

Ça te Barbara

Ta gueule– Bertrand Ferrier, ce mardi, vous vous apprêtez à répéter avec Fabrice Dupray, baryton au Chœur de la Philharmonie de Paris, trompettissse virtuose, prof en conservartoire et…
– Certes, ça va, calme-toi…
– Comment vous préparez-vous ?
– Je suis essstrêmement serein, et je n’hésiterai pas à lui réclamer qui un café, qui un rhum préparé. Y a un minimum de respect, quand même. Quant à le “on entend bien qu’vous avez pas enregistré à Abbey Road” et mes interludes en 4/4 contre le 3/4 pour évoquer le temps perdu, si c’est la question…
– Non. En dehors de votre taux d’alcoolémie, avez-vous vraiment travaillé, notamment les passages qui, lors de la dernière répétition…
– En même temps, j’ai pas vraiment à te répondre, gros con.
– Je n’ai pas d’autre question, Votre Honneur.

Sad sadisme

Univers impitoyrableVoilà à quoi ressemble le sadisme entre organissses : laisser, près de la console, en évidence un paquet de Bim’s (comme des Pim’s mais en faux). Vide. Le jour où tu invites un remplaçant à sévir. Comme par zazar. Entre eux, les organissses sont vraiment sans pitié.