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Au swing, citoyens

Concert 18 décembreAccompagnement de gospels, classiques remixés pour orgue et violon, et ploum-ploums subtils sous chants de Noël : de quoi remplir un p’tit dimanche aprème sympathiquement, entre deux messes et un baptême !

Ensemble Diderot, Institut Goethe, 13 décembre 2016

Paris en hiverAvec son formalisme empesé (mouvement lent – mouvement vif – mouvement lent – mouvement vif… ou l’inverse), la sonate française de la première moitié du dix-huitième siècle ennuie d’avance. C’est compter sans la vivacité et l’ingéniosité de l’ensemble Diderot, produit par le label Audax que distribue Socadisc – même si cet article est corrompu puisque nous bénéficions d’une invitation pour ce concert.
Institut Goethe : avantD’abord, il nous faut louer ces concerts où, effectivement, il nous arrive d’être convié, mais qui sont bien remplis sans être complets alors qu’ils ont tous les atouts : superbe salle, excellent confort des spectateurs, parfaite desserte parisienne (métro Charles-de-Gaulle à sept minutes à pied), programme à échelle humaine (entre 1 h et 1 h 20), jeunes virtuoses en live pour 10 € maxi, verres et bretzels de l’amitié offerts à la sortie avec un service prévenant. Oui, on peut m’accuser d’être lèche-fesses, mais, d’une part, j’en ai rien à carrer et, d’autre part, c’est plutôt de la jalousie de ma part de reconnaître que j’aimerais organiser des concerts de ce type, alors ça va, quoi, bref. (“Oui, mais au moment où ce concert se situe, Alep meurt… / – Si Alep meurt à cause de la musique baroque, jette-moi la première bière. Sinon, jette-toi sur les premières pierres que tu rencontres. Un métro peut s’y substituer.”)

François Segré (Socadisc)

François Segré (Socadisc)

Ensuite, il nous faut saluer cet Ensemble Diderot que nous découvrons en concert ce 13 décembre. Sous l’impulsion du violonissse Johannes Pramsohler, dont la physionomie oculaire n’est pas sans rappeler Lionel Messi, le projet baroque rassemble Roldán Bernabé au second violon, Gulrim Choi au violoncelle, Kristen Huebner à la flûte (non permanente, d’après le site) et Philippe Grisvard au clavecin. Uniquement de très bons musiciens, la suite du concert le prouve. Comme le souligne François Segré au début du show, oser produire à l’Institut Goethe un concert de musique française propulsé par un ensemble au nom francophone dont le leader est un Autrichien parfaitement francofluide, quelle audace !

Johannes Pramsohler, Roldan Bernabé et Kristen Huebner

Johannes Pramsohler, Roldan Bernabé et Kristen Huebner

Enfin, il nous faut applaudir un programme construit avec art et malice. Le concert s’ouvre sur l’Ouverture en la majeur de Jean-Marie Leclair, op. 13 n°3. La pièce, solennelle et vive, donne à saisir d’emblée les forces en présence : digitalité du chef, réponse sensible du second violon, parfaite adéquation de la basse continue. La sonate en trio op. 2 n°5 de Jean-Joseph Cassanea de Mondonville ouvre le répertoire à la flûte chaude et envoûtante de Kristen Huebner. En sus, elle permet au big boss d’expliquer que cette pièce se peut jouer avec deux violons ou, choix opportun pour souligner la diversité du répertoire, un violon et un traverso. La pétillante sonate de Jean-Marie Leclair pour deux violons (op. 12 n°5) souligne ce mélange de complicité et de confrontation qui unit et pousse à rebondir les deux virtuoses en présence. Notre voisine, jeune et mignonne invitée placée chez les VIP, s’exaspère car son maître (merci à lui) lui a intimé d’arrêter de prendre des photos – mais pas de se caresser ses magnifiques cheveux ou de croiser et décroiser ses jambes sharonstoniennes. Derrière nous, une esssperte esssplique que “l’incroyable, c’est le feeling d’énergie qui va de la musique à nous”, wouah. Ces connaisseuses n’y peuvent mais : hormis elles, peut-être, la musique jouée par l’Ensemble Diderot saisit l’assistance ; le sens du son (filé ou percutant) séduit l’oreille ; l’envie de dialogue musical happe l’écoute. Tout cela est fort bien fait et très séduisant, au point que la seconde sonate de Mondonville (op 2 n° 6 d’après Johannes Pramsohler), pourtant très exigeante individuellement et synchroniquement, ne paraît pas essentielle – sauf aux amateurs de forme ABA + coda. En effet, chacun est curieux d’ouïr le Concerto à quatre parties en la mineur du sieur Michel Blavet, associant un duo de violons et une basse continue à la flûtiste quasi soliste. Le résultat est séduisant, confrontant une virtuosité joyeuse à deux éléments indispensables : l’attention entre les musiciens (y compris le clavecinissse, toujours à l’écoute de ses partenaires) et l’envie de nuancer, soit par la puissance, soit par les articulations et la dynamique. La reprise d’une partie en bis permet au public de partir repu et admiratif vers le verre amical (les verres, si l’on en juge au nombre de mâles spécifiant qu’ils ne venaient pas re-prendre un verre pour eux).

Philippe Grisvard et Gulrim Choi

Philippe Grisvard et Gulrim Choi

En prime, il nous faut reconnaître que, à chaque fois que nous sommes allés à ces concerts – soit deux fois plus une où nous nous sommes perdu, oui, au centre d’un des Paris chic mais c’est pas la question –, nous avons rencontré des spécimens de spectateurs qui valaient, presque à eux seuls, le déplacement – et, chose essseptionnelle, nous ne parlons presque pas de nous. Cette fois, c’était une étonnante semi-vieille dame au foulard type Burberry, qui nous a expliqué qu’elle devait passer devant tout le monde dans la queue car elle venait de Boissière (donc à deux rues du concert) en taxi, à cause d’une douleur à la main (“Remarquez, j’ai croisé une altiste à l’hôpital, elle avait le canal carpien bouché, c’est moins grave pour moi qui suis pianissse, mais mon mari ayant changé de travail, nous avons moins d’invitations et on ne nous offre pas de disque, d’ailleurs je vais en acheter un, pas vous, bien sûr, alors que vous auriez sûrement les moyens – Mais je sais me tenir – Comment ça ? – Ben, j’ai aussi les moyens de vous foutre mon poing dans la gueule et je le fais pas – Ah oui, vu comme ça, certes”). Dit de la sorte, ces rencontres impromptues peuvent avoir un soupçon d’agressivité ; dans la réalité, ce sont des expériences fort disruptives (ces mots n’ayant aucun sens, ou n’en ayant plus, je suis ravi de les utiliser). Out in ParisProchain concert le 10 janvier (non encore inscrit sur le site au moment où nous rédigeons ces lignes). J’espère être invité mais, si vous ne l’êtes pas, je vous incite à venir siroter Bach, Piazzolla, et le Fitou d’après-concert : au vu des précédents épisodes, cela promet d’être brillant, intéressant et convivial. What else?

Rendez-vous à l’église des Sables

L'église des SablesCe vendredi, 20 h, récital d’orgue à l’église des Sables-d’Olonne avec Emmanuel Quiquemelle.

Samedi, 10 h, masterclass d’improvisation avec les élèves d’orgue du conservatoire.
Samedi, 15 h, rencontre-dédicace à la toute nouvelle médiathèque, animée par Nadia Bellenger, autour de L’Homme qui jouait de l’orgue (Max Milo).
Les vedettes de l’orgue que je reluque sur Facebook jouent des orgues incroyables dans le monde entier – et ils le méritent, les bâtards. N’empêche, parfois, à mon échelle, la vie s’annonce belle, comme à la fin de la Dame du dixième.

Nataly Adrian réchauffe le livre pour la jeunesse

Les mininounours de Nataly Adrian écoutent Laurent Marsick parler de leur patronne. Photo : Nataly Adrian.

Les mininounours de Nataly Adrian écoutent Laurent Marsick parler de leur patronne. Photo : Nataly Adrian.

Même si RTL découvre fin 2016 le Prince de Motordu (créé en 1980) et Le Journal d’un dégonflé (offfficiellement vendu à 165 millions d’exemplaires), la radio met aussi un focusss sur le premier tome du Secret du coquillage by Nataly Adrian, chez Label Libertad. Très bon choix, celui-ci, que l’on peut acquisitionner promptement ici car “c’est plein de poésie”. Et surtout, c’est bien, alors ça va, quoi.

Cavalleria rusticana and more, Opéra Bastille, 12 décembre 2016

Sancta SusannaDuo improbable à l’opéra Bastille : un hit de la Scala, Cavalleria rusticana (1890) de Pietro Mascagni, et la vraie nouvelle production de l’Opéra de Paris, 25′ de Paul Hindemith via Sancta Susanna (1922), un opéra “de jeunesse” du zozo.
En première partie (1 h 20), Cavalleria rusticana expose les joyeuses turpitudes de Turiddu, amant de Lola (mariée à Alfio) et de Santuzza, sa promise et fille de Mamma Lucia. Le jour de Pâques, excédée, Santuzza dénonce Turiddu à Alfio, qui défie Turiddu en duel et lui défonce sa race, ce qui rend triste tous les hypocrites, donc tout le monde.
Distribution françaiseDifficile de passer outre les exaspérations coutumières : pas d’artissse français à l’Opéra national de Paris (si, Antoinette Dennefeld risque une appétissante Lola, mais on voit son rang dans la distribution photographiée ci-dessus), bonheur fiscal de payer des Slaves oblige ; une absence de décor honteuse (hormis un autel, des chaises et un banc, seul un bordel non prévu par le scénario traverse la scène) ; des lumières qui éclairent de façon à laisser dans l’ombre ce qu’elles éclairent… En dehors, donc, du spectacle pitoyable et des synchros pas parfaites entre l’orchestre dirigé par Carlo Rizzi et les solistes – en dépit de la harpiste fiable, du tubiste virevoltant et d’un clarinettiste sensuel à souhait, what ? Peu de tension, peu d’émotion, comme si le cliché structurant le mélodrame devait éteindre toute velléité de le prendre au sérieux. On savoure la virtuosité d’Elīna Garanča, dans les aigus comme dans les graves, et la fierté mâle de Vitaliy Bilyy ; en revanche, on ouh-ouhte Yonghoon Lee, voix d’airain mais jeu résolument de type acteur asiatique en roue libre (excès, abus, too muchisme, bref), ce qui impacte sa musicalité à travers les accents stupides que son jeu ridicule (à-coups liés à ses mouvements de main, en deux mots) impulse à sa ligne.
En complément de programme, Sancta Susanna pointe le génie musical de Paul Hindemith. Sur un livret abscons d’August Stramm, on ne comprend rien si on n’a pas révisé avant, mais on savoure la maîtrise orchestrale du mec qui dit aux vrais musiciens ce qu’est-ce qu’ils doivent faire. Dans la théorie, la religieuse Susanna est confondue avec Sainte Suzanne par Klementia. Mais la vraie Susanna entend des voix, qui finissent par se réduire à celle d’une religieuse coupable de s’être masturbée nue sur un crucifix. Susanna fait pareil ; comme la précédente, elle est emmurée vivante.
Entretemps, on a été bien embêté avec nos jumelles de théâtre. Les utiliser, c’était mater les nichons d’une jolie jouvencelle, puis celle d’une fille à poils, puis celle d’une autre nana toute nue transbahutée par une araignée (donc à poils), puis ceux d’Anna Caterina Antonacci, censée être dévêtue mais sans doute assez connue pour dire “mes nichons, ça suffit”. Bien sûr, incrédule, on a maté, faut pas déconner, même si, sans forfanterie (pouët-pouët), on connaît quelques choses du réel et des possibles du Net, reste que, quand même : pourquoi la métaphore vaut-elle pour le non-à-poilisme, pas pour le reste ? La stérilité stupide de Sergio Tramonti, le décorateur, et la pauvreté créative de Mario Martone, le metteur en scène, sidèrent. Une fois de plus, aucun Français en rôle principal (Anna Caterina Antonacci et l’Allemande Renée Morloc se partagent les deux grands rôles), mais, chose rare, on note un vague décor de mini-cellule de religieuse installée sur pilotis, le tout se refermant pour emmurer la salope de Susanna se branlant sur le crucifix de biais (le méga crucifix occupant le fond étant inaccessible).
Moralité, si l’on peut dire : plus la saison 2016-2017 avance, plus on se dit que, même si l’occasion est unique d’entendre “en vrai” des compositions exceptionnelles, le piètre spectacle donné, la sous-utilisation des vedettes convoquées, et le manque de recours aux artistes français en dépit des sommes monstrueuses payées par l’État français (et par quelques spectateurs français, en l’espèce), amènent à douter du bien-fondé de l’excitation qui m’habite, sans jeu de mot ou presque, à chaque fois que je gagne Bastille…

La it-poste

Étienne Desaux à Saint-André de l'EuropePhoto volée juste avant le concert du 11 décembre. Au meilleur du programme de ouf : Messe de Vierne – Gloria de Poulenc avec Yu Matsuoka à l’orgue de chœur et Étienne Desaux au grantorg. Le nombre de Post-it tient lieu de faire-part. (Non, ça ne veut rien dire, mais c’est ce que j’ai trouvé de plus nadmiratif.) Résultat convaincant, remix dimanche 18 décembre à Notre-Dame de la Sagesse, tout un projet.

Komm Bach - Concert du 11 décembre 2016

Niagara Gonzalez

CascadesJe pourrais essspliquer que cette photo est issue d’une capture d’écran d’un retour vidéo défaillant à l’orgue Gonzalez de la collégiale Saint-Martin de Montmorency. Mais, franchement, qu’est-ce qu’on s’en tampiponne au niveau du bibobéchon ?

Innesti (Luigia Riva), Théâtre de Chaillot, 8 décembre 2016

L'homme vu par Luigia Riva

L’homme vu par Luigia Riva

Quatre danseurs en slip doré (l’homme tire toute sa gloire de sa bite, mais elle n’est que paillette quand elle n’est pas poutre, qui n’en doute ?) affublés de proéminences situées à l’intersection entre le ganglion et le muscle hypertrophié : telle est l’arme qu’a dégainée Luigia Riva, chorégraphe, contre le machisme, l’androcentrisme et le seskisme. En tout cas, telle est la promesse d’Innesti, id est celle d’une “danse organique” en tant qu’elle serait l’anatomie d’une virilité normée, geste puissant, [qui] remue nos inconscients”.
Comme il s’agit de conscientiser l’inconscient et de fouler le refoulé – qui refoule la foule, bien sûr, il s’agit aussi de remuer de façon inremuante. Le premier tiers du spectacle est donc constitué par un magma d’hommes entassés et enlacés qui, partis de jardin où ils avoisinaient l’état végétatif d’une assemblée fécale, finissent par s’exhumer de leur fausse fosse pour découvrir, enfin, leur personnalité impersonnelle. De part et d’autre de l’espace vide, en fond jardin et en scène cour, deux bancs constituent les seuls éléments de décor hors des corps – faut pas provoquer mon inconscient, il devient fou – où viennent se poser des corps en pause. Sur une musique (plutôt un bruitage pénible qui semble avoir pour vocation d’éviter que le public ne s’endorme de suite – ou de cuite, ça marche aussi) de Joseph Marzolla, les quatre danseurs évoluent en se jetant leur dévolu, je sais mais bon, s’affrontent, se caressent, se rejoignent, risquent poliment quelques soli mais très peu de figures parallèles – sans doute antinomiques de la prétention de l’hypervirilité dominatrice – pour finir par se débarrasser de leur superflu, donc sortir à poil, Deux kangourous devant la véranda obligeant. Entre alors, attention spoiler, Axel Léotard, un danseur tatoué venu de la salle qui, ni une ni deux, se met nu. Pour s’occuper, on regarde sa bite. Manque de pot, c’est un transsexuel “femme vers homme », donc un “homme vaginal » (on apprend tous les jours un peu, chacun l’entendra comme il veut). Il/elle ramasse les attributs des hypervirils disparus et s’endort à mi-chemin. Deux kangourous devant la véranda oblige, certains spectateurs en font autant, ce qui est dommage vu que c’est fini.

Cet éloge de la lenteur qu’accompagnent des lumières simples et monochromes plutôt convaincantes, cette désarticulation du corps par sa torsion et/ou sa collectivisation, cette mise à nu(es) de l’importance sociétale de la corporéité, cette extraction de l’évidence (l’importance du corps) par une dé-scénarisation remettant à plat ce que notre quotidien valorise (dépourvu de fantasme narratif, le corps n’a guère d’intérêt, du coup on sent merde, d’où l’impression liminaire que l’an nuit), bref, ce coup de boutoir à visée, suppute-t-on, partiellement homo-érotique dans un monde où la peur de l’homosexualité serait une manière fachissse de contrebalancer les victoires de l’indépendance féminine, tout cela, donc, répond à Inedito 2 (Chaillot, 2012), où la chorégraphe mettait aussi en scène des danseuses nues mais entravées. Des extraits sont à voir ici. La version mâle de 2016, dont l’intérêt ne nous a pas pété au visage comme un anus d’hippopotame après une dégustation de lentilles – malgré notre plaisir de profiter d’une invitation inattendue – vaut 37 € en plein tarif. Pour info, c’était plein le 7 décembre et ça finit le 10.

Ce que nous deviendrons

Ce que nous deviendrons

Les jeunes au pouvoir

Christophe Mantoux présenteCe vendredi, le gang de Christophe Mantoux prend le pouvoir à l’orgue de Saint-André de l’Europe. Pour les écouter, glissez-vous pour 20 h au 24, bis rue de Saint-Pétersbourg (Paris 8), juste à côté de la place de Clichy et de Chouchou. Entrée gratuite, belle zizique azurée.programme-concert-062programme-concert-063